Une Saint-Quentinoise jugée pour apologie du terrorisme à Amiens
Par GAUTIER LECARDONNEL
Fatima, fichée S, est la seule assignée à résidence de la Somme. Elle a été jugée ce jeudi 29 septembre pour apologie du terrorisme. Mariée pendant 5 ans à un radicalisée, elle nie les faits.
Fatima, 26 ans, se présente à la barre du tribunal en jean et baskets, les cheveux longs détachés. Les autorités ont repéré en octobre 2015 des publications sur son compte Facebook faisant l’apologie du terrorisme. Son pseudonyme, tout d’abord, qui se résume à des prénoms pouvant être traduits par « la mère du djihad et l’épée d’Allah ». Cette phrase aussi, écrite en arabe, pouvant signifier « Allégeance à l’islam et désaveu à tout ce qui y est contraire ». Cette vidéo enfin, faisant défiler un texte qui préconise de faire le djihad et d’attaquer les mécréants comme les non-musulmans. Cette photo encore, où elle pose en hidjab noir tout sourire, un drapeau d’Al-Qaida accroché sur le mur, derrière elle.
L’Amiénoise née à Saint-Quentin avoue : elle a évolué dans un milieu radicalisé. Elle s’est mariée en 2010 et dit avoir découvert que son époux était un islamiste radical « peu de temps » après son mariage. L’Amiénoise vit alors à Anvers en Belgique. Elle fréquente des personnes radicalisées, « les femmes des amis de mon mari ». « Il disait que l’action de Daech en Syrie, c’était bien ». À force, a-t-elle dit aux policiers, « il m’a convaincue, mais je n’avais pas ces idées-là auparavant ».
Radicalisée sous influence ? Fatima s’est séparée de son mari en septembre 2015. Elle explique avoir été battue à plusieurs reprises en Belgique. Qu’elle « ne pouvait rien faire », qu’elle « restait toujours enfermée ». L’Amiénoise ne « se souvient pas » avoir publié ce qu’on lui reproche sur Facebook, affirme qu’il est possible que son ancien mari ait eu accès à son compte. Quant à cette phrase écrite en arabe, signifiant le désaveu à tout ce qui est contraire à l’islam, qu’elle reconnaît avoir publiée, « je n’avais pas conscience que cela pouvait influencer des gens de partir en Syrie ».
Titulaire d’une licence d’espagnol
Durant l’audience, Fatima pleure. Elle est accusée d’incitation à commettre des actes terroristes : « Je suis contre le terrorisme », affirme-t-elle, rappelant que cela consiste « à tuer des innocents ». Mais par la voix d’Anne Le Gunehec, le Parquet n’y croit pas. « Les éléments sont accablants ». Les publications sur les réseaux sociaux « sont des choses très graves », parce que cela « participe à la stratégie des organisations terroristes ». « Elle est peut-être effrayée par les attentats de novembre 2015, sauf que c’est avec des phrases comme celles-là (Ndlr : celles qu’elle a publiées) que d’autres passent à l’action ! »
Le Parquet requiert deux ans de prison avec sursis et l’obligation de participer à un stage de déradicalisation. Me Djamila Berriah, l’avocate de Fatima, est, elle, « persuadée de l’innocence » de sa cliente. Elle plaide la relaxe. Pour elle, l’accusation n’est faite que « de bric et de broc » : « La procédure est à charge du début à la fin ! ». L’avocate s’étonne que cette affaire ait mobilisé 13 personnes (policiers, préfet, procureur, etc.) au cours des 48 heures de garde à vue de l’Amiénoise. Elle dénonce « des problèmes de procédure majeurs », et une jeune femme « bafouée dans ses droits les plus élémentaires ».
Fatima, titulaire d’une licence d’espagnol, est sans emploi. Depuis décembre, elle doit pointer au commissariat trois fois par jour, et a l’interdiction de sortir de chez elle de 20 heures à 6 heures. La décision sera rendue le 18 octobre.
GAUTIER LECARDONNEL
Source
http://www.aisnenouvelle.fr/region/une-saint-quentinoise-jugee-pour-apologie-du-terrorisme-a-ia0b0n424171