Tags et menaces antisémites dans l’ immeuble de Mireille KNOLL à Paris : la mère accuse sa fille

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Le parquet de Paris a requis, ce lundi soir, trois ans de prison dont deux probatoires, contre Nancy S., 51 ans, accusée d’être à l’origine des tags dont elle se disait victime, ainsi que des dénonciations calomnieuses. Dix-sept plaintes avaient été déposées.
Par Carole Sterlé

La parole d’une mère contre celle de sa fille. Et un sentiment de gêne, qui s’est emparé de la salle d’audience au sixième étage du tribunal judiciaire de Paris, où était jugée ce lundi soir Nancy S. Cette femme de 51 ans, en jean, baskets, cheveux blonds, est accusée d’être à l’origine de la cabale antisémite dont elle se disait elle-même victime, à l’automne 2024, à Paris XIe.
Ciblée par des tags antisémites, croix gammées, lettres de menaces anonymes, des boîtes à lettres jusqu’à sa porte de palier… La fille, mineure, est placée depuis et n’est pas présente à l’audience. Après avoir mis sa mère hors de cause, elle l’a accusée d’être à l’initiative de ce vaste mensonge, « pour se venger d’une voisine » qui avait contacté le 119, dédié à l’enfance maltraitée. À la barre, la mère s’en défend et renvoie la responsabilité sur sa fille.
« Je ne reconnais pas les faits », explique la quinquagénaire au tribunal, pourtant filmée dans l’ascenseur, le 18 janvier 2025, avec sa fille, un marqueur à la main. Après dix-sept plaintes, les enquêteurs avaient fini par installer une caméra dans l’ascenseur. Le tribunal a décidé de visionner les images. On aperçoit la chevelure blonde de la mère, de dos. Face à elle, sa fille, visage rond, qui semble écouter, prend des photos de l’intérieur de la cabine, avant de tracer au marqueur de sa main gauche, les tags qui seront dénoncés plus tard. On ne sait pas ce que sa mère lui dit, il n’y a pas de son.
La fille qui trace, la mère qui guide
La fille qui trace, la mère qui guide : pas de doute pour l’accusation, qui réclame contre la quinquagénaire trois ans de prison dont deux probatoires, avec une obligation de soins et de formation, l’interdiction de paraître dans l’immeuble, et non des moindres, une interdiction de contact avec sa fille de 16 ans et demi durant cinq ans.
« Vous allez me dire que c’est incroyable, mais je n’en pouvais plus », dit-elle en revenant sur ce 18 janvier 2024. Sa fille, secouée par le signalement de la voisine, qui avait déclenché une enquête sociale, lui aurait dit « ne t’inquiète pas, on va faire sortir le loup de la forêt », en « suggérant, de faire des tags pour que la personne s’énerve ». En clair, pour démasquer le corbeau. « Moi j’étais dans un état lamentable » ajoute-t-elle, indiquant aussi que sa fille se sentait mal-aimée, reconnaissant qu’elle dédiait son temps au jeune frère, malade, les deux enfants ont été adoptés en Afrique.
« De peur qu’on lui enlève sa fille »
Si la mère n’a rien dit aux policiers, c’était, dit-elle, « de peur qu’on lui enlève sa fille ». Avant de s’accuser elle-même lors de son deuxième interrogatoire en garde à vue, pour finalement se rétracter. L’adolescente, qui avait mis sa mère hors de cause, a fini par l’accuser. Me Philippe Sarda, l’avocat de la mère, réclame qu’on écoute son audition. Le tribunal accepte de briser les scellés, la greffière sort son propre ordinateur pour avoir le son.

Force est de constater que tout n’est pas retranscrit sur procès-verbal, comme lorsque le policier dit à l’adolescente : « Je sais que vous n’êtes pas l’auteure, vous n’êtes pas l’instigatrice, vous êtes un outil et on a abusé de vous ». L’adolescente demande si « sa mère va aller en prison ? » Une fois que le policer répond non, elle déroule le fil et met en cause sa mère. « Des aveux entachés de nullité », estime Me Sarda, qui estime les réquisitions totalement disproportionnées, et notamment l’interdiction de tout contact pendant cinq ans.
« J’ai cru que l’assassin viendrait chez moi »
Le sort de l’adolescente relève du tribunal pour enfant. Elle est sous le coup d’une mesure d’assistance éducative, et semble « plutôt satisfaite de son placement », relève le tribunal. La lettre anonyme, dont le timbre a été acheté précisément par la mère, à l’automne dans le XIXe arrondissement ? La mère l’impute aussi à sa fille.

La partie civile et l’accusation n’y croient pas, évoquent tour à tour une « enfant sous emprise », « influencée », dans un « lourd conflit de loyauté ». Paris Habitat réclame 7 000 € pour le remplacement des boîtes aux lettres, l’effacement des tags était impossible, ainsi que 5 000 € pour le préjudice moral. La voisine, à l’origine du signalement, n’est pas venue, mais dénonce, par la voix de son conseil un préjudice moral.
Un locataire de 94 ans a, lui, fait le déplacement. Enfant de déportés, il est rescapé de la Shoah et s’est employé toute sa vie à défendre la mémoire des enfants juifs déportés. Ces tags l’ont plongé dans une profonde détresse, rappelle une de ses filles qui l’accompagnent. Il a fêté le réveillon de Noël 2024 à l’hôpital, et soufflé ses 94 bougies dans l’angoisse. « J’ai cru que l’assassin pourrait venir chez moi », explique ce frêle monsieur en déambulateur, moustache blanche et casquette noire, qui s’enfermait à double tour chez lui depuis l’automne. Lui qui n’en est pas revenu que le corbeau était Nancy S., petite-fille de déporté.
Cet immeuble est aussi celui où Mireille Knoll, 85 ans, a été tuée dans d’atroces circonstances par un voisin, parce que juive, en 2018. Éreinté par dix heures de présence au tribunal, le nonagénaire est reparti avant la fin du procès et sans les explications qu’il espérait. Sans entendre non plus les excuses, en larmes de Nancy S., versées en tant que mère. Le délibéré sera rendu le 14 mai.
Source
Le Parisien

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1 Comment

  1. joseparis dit :

    Abracadabrantesque cette histoire ! Le plus à plaindre c’est le pauvre monsieur rescapé de la shoah de 94 ans. La mère il faut l’interner et la soigner.

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