« Sauver des Juifs était une chose naturelle pour elle » : la fille d’une Juste de retour dans l’Oise
Françoise Chevalier s’est rendue à une exposition à Ver-sur-Launette rendant hommage à sa famille. Durant la guerre, Marthe Jungfleisch et sa fille Madeleine, agricultrices, ont hébergé des réfugiés juifs dans leur ferme.
En ce fin de mois de décembre, Françoise Chevalier, 77 ans, était de retour dans son village natal de Ver-sur-Launette, dans le sud de l’Oise. À l’invitation de la municipalité, elle a visité l’exposition consacrée à sa mère, Madeleine Grenèche Jungfleisch et à sa grand-mère, Marthe Jungfleish. Ces deux femmes, agricultrices, font partie des vingt-huit Justes de l’Oise. Des hommes et des femmes qui, au péril de leur vie, ont aidé des juifs persécutés par l’occupant nazi.
Marthe et Madeleine faisaient partie du réseau de l’abbé Jean Terruwe, un prêtre affecté à la paroisse de Dammartin-en-Goële (Seine-et-Marne). Ce dernier était chargé de trouver des logements ou des familles d’accueil pour les rescapés des rafles de 1942. La mère et la fille, âgée de 18 ans, ont hébergé une petite fille juive, Eva Klimberg, 9 ans, ainsi qu’une douzaine d’autres jeunes, dont certains étaient des réfractaires au service du travail obligatoire (STO) et six autres juifs jusqu’à la fin de la guerre. «Pour la récolte des légumes, il y avait besoin de beaucoup de main-d’œuvre. À l’époque, la ferme tournait avec des saisonniers de passage. Ils se sont fondus dans la masse, raconte Françoise Chevalier. Les villageois voyaient bien ce qu’il se passait, mais personne ne disait rien. Chacun avait aussi besoin de la ferme pour se nourrir. Il n’y a eu aucune volonté de nuire de leur part, c’est un bel exemple de solidarité».
Un sujet resté longtemps tabou dans la famille
Françoise n’a longtemps rien su sur le passé héroïque de sa famille. «Les enfants n’avaient déjà pas le droit à la parole en présence d’adultes, alors vous imaginez bien, leur poser des questions, c’était inimaginable…» Il a fallu attendre le début des années 1990-2000, lorsque Simone Veil et le président de la République Jacques Chirac font entrer les Justes de France au Panthéon, pour que la parole se libère peu à peu. «Ma grand-mère était un peu rebelle, tonique et n’avait pas peur du qu’en dira-t-on. Elles ont caché des juifs pendant la guerre, pour elles, c’était une chose naturelle que de pouvoir les aider.» Tous les protégés de la ferme ont survécu. En 1996, Yad Vashem, Institut international pour la mémoire de la Shoah, décerne à Madeleine et à Marthe, la médaille des Justes. «Ma mère était très reconnaissante de recevoir cette distinction et elle en tirait une grande fierté. Cet épisode l’a rapproché encore plus d’Eva.»
Le village a voulu se remémorer ce passé, en accueillant l’exposition itinérante réalisée par la Conférence des évêques de France, Yad Vashem et le diocèse de Beauvais. La commune a complété avec ses propres recherches « C’est important de pouvoir transmettre cette histoire aux plus jeunes et rappeler l’élan de solidarité qui a eu lieu dans le village», témoigne Stéphanie Pois, conseillère municipale.
La ferme existe toujours, même si elle a beaucoup changé. Elle est aujourd’hui située rue des Bons Voisins. Comme un clin d’œil au destin…
L’exposition «Du cri du coeur à la voix des Justes», réalisé par le diocèse de l’Oise, est à découvrir aux ouvertures de la mairie, de 14 à 18 heures, les lundi, mardi et vendredi jusqu’au 5 janvier.
Les justes de l’Oise
Rainvillers
Léon Babin, maire, gendarme à la retraite et sa femme Jeanine ont recueilli deux enfants, Solange et Jean-Louis Dreyfus.
Pontoise-lès-Noyon
Marguerite Camplan, membre de l’organisation clandestine communiste Mouvement national contre le racisme, confie à Mme Leroux qui habite Pontoise-lès-Noyon la garde de trois enfants: Ginette et Adolphe Pomeranc rejoints par Serge Lewkowicz qui ont échappé à la rafle du Vel d’Hiv, à Paris, en juillet 1942.
Cambronne-lès-Clermont
Parents de deux enfants, le couple d’agriculteurs Charles et Raymonde Carpentier recueillent en 1942, deux enfants juifs Rachel et Joséphine Sosiewicz, jusqu’à la fin de la guerre. Seul le maire du village savait qui étaient ces enfants.
Plailly
Concierges de la synagogue Nazareth à Paris, Edmond et Fernande Cheval accueillent une petite fille, Marie-Louise Zylberberg âgée de deux ans, surnommée Malou, après que sa famille fut déportée. Pour plus de sécurité, la famille Cheval se réfugie à Plailly jusqu’à la fin de la guerre.
Villers-Saint-Sépulcre
Ernestine Desplanques est veuve et vit avec sa mère Amélie Mergoux-Defossé. Toutes deux recueillent trois enfants: Danielle Zeldine, en 1940, puis en 1942, Jean et Michel Pleskoff, qu’elles vont considérer et aimer comme leurs enfants.
Villeselve
Louis Greffe, bourrelier et sa femme Marie Greffe née Fagard recueillent une enfant, Rivka Patalowski.
Saint-Jean-aux-Bois
André Hammel dirige une clinique psychiatrique à Saint-Jean-aux-Bois, dont il est également maire. Très lié aux pasteurs André Trocmé et Adouard Theis, qui ont établi un réseau d’aide aux juifs au Chambon-sur-Lignon (Haute-Loire), et souvent aidé par sa femme Georgette, il prend comme pensionnaires durant deux ans et demi (de début 1942 à la Libération), dix juifs adultes et une enfant originaire d’Europe de l’Est. Il donne aussi refuge à des parachutistes anglais. Pour assurer la protection de ses «patients», il les camoufle en patients psychiatriques.
Verberie
Dans le cadre de la charge qui lui est confiée par le gouvernement de Vichy de monter des centres pour jeunes, Jean Jousselin, pasteur protestant, vient en aide à de nombreux juifs en leur fournissant de faux papiers. Après avoir été démis de ses fonctions car «trop proche des juifs», il devient directeur de la Maison-Verte à Paris, puis dès 1943 directeur de la colonie de vacances protestante Cappy à Verberie. C’est là qu’il donne asile à des dizaines d’enfants juifs et leur permet de suivre leur scolarité à Verberie. En 1944, il héberge 125 enfants dont 87 juifs.
Montjavoult
Jeanne Lamboux recueille deux fillettes juives, Monique et Micheline Spiegel, pendant un an et demi, entre 1942 et 1944, aidée par le secrétaire de mairie et instituteur, Marcel Dumont.
Cires-lès-Mello
Au soir de la grande rafle du Vel d’Hiv, le 6 juillet 1942, Maurice et Marcelle Parée, qui vivent avec leurs trois enfants à Cires-lès-Mello, reçoivent un coup de téléphone de leur sœur, concierge à Paris, leur demandant de recueillir une petite Colette Lichtenbaum, 7 ans, qui vient d’échapper à la rafle. Ce qu’ils acceptent dès le lendemain, la faisant passer pour leur nièce et la protégeant ainsi pendant un an.
LaBruyère
Alors que 15 patients sont arrêtés par les Allemands dans l’hôpital Paul-Doumer, Edgar Lobgeois, employé au service d’incinération, remarque que l’un d’eux, Henri Sztruzman, parvient à s’échapper. Il le cache chez lui, puis le conduit à la gare pour Paris. Tous les autres sont déportés.
Maignelay-Montigny
Suzanne Merlette Lefebvre cache deux enfants juifs, de 1942 à 1945, Robert, 7 ans, et Janine Gerson, 4 ans, avec l’aide de l’instituteur et secrétaire de mairie. Pour la sécurité des enfants, elle demande à leurs parents s’ils acceptent de les faire baptiser : « Faites tout ce qu’il faut, pourvu que vous sauviez mes enfants. » À la fin de la guerre, les enfants ne retrouveront pas leur mère.
Compiègne
– Rachel et Léon Malmed sont les petits voisins de la famille Ribouleau. Après l’arrestation de leurs parents en juillet 1942, ils sont recueillis par Henri et Suzanne, qui vont les considérer comme leurs enfants. Leurs parents ne reviendront pas des camps d’extermination.
– Robert et Charlotte Ruffin, propriétaires d’un café-épicerie, accueillent un enfant, Jacques Wenig, alors âgé de 6 ans, qu’ils présentent comme leur filleul, mais considèrent comme leur fils adoptif. Après la guerre, Jacques retrouvera son père qui a survécu à la déportation, sa mère et son jeune frère lui-même caché par une famille dans la Somme.
Cauvigny
Le maire Marcel Salagnad et sa femme Aline Salagnad, accueillent deux enfants, Éliane Nahama, 3 ans, et son cousin Marcel Schreiber du même âge. Ils les aiment comme leurs enfants.
Ces informations sont issues de l’exposition « Du cri du cœur à la voix des justes ».
Source
https://www.courrier-picard.fr/
Magnifique 👏🏻👏🏻👏🏻
Bravo et merci Madame vous avez vraiment de quoi êtes fière
Immense Respect à vous et à tous les autres justes de France et d ailleurs ..,!
Ces français qui ont aidé les juifs dans ces temps où trop peu de gens leurs tendaient la main ont été extraordinaires de courage et de bienveillance. Ma mère et ses parents en ont bénéficié, et ont ainsi survécu pendant toute la guerre en évitant les rafles et la déportation. Il ne faut jamais cesser de rappeler leurs noms, leurs actes, et de continuer de les honorer.
C’est ainsi que ma mère et son petit frère furent cachés dans un village du Massif Central, deux ans durant et participant au travail de la ferme. Ce n’est que par le mutisme de tous les villageois qu’ils eurent la vie sauve. Ainsi, mes grands-parents placèrent et sauvèrent leur trois enfants, deux en zone libre et l’aîné avec eux, tous les cinq sains et saufs à la fin de la guerre.
Une trentaine d’années plus tard, nous avions tous rendu une émouvante visite aux enfants de ce couple de paysans, bénis soient-ils.
La belle France,une France de justes,fiers,trés fiers de ces gens 🙏.
Nous avions des voisins(Allemagne),couple de toxico-alcoolo,ils avaient une gamine adorable.Cette petite venait souvent chez nous.Un jour elle fût toute heureuse de nous dire que ses arrieres grand-parents avaient caché une femme juive chez eux.N´oublions pas le courage des jeunes allemand de la « Rose blanche »🙏.
🙏✡✝👍💪
Bravo et honneur à elle !