Nous avons infiltré une formation d’Urgence Palestine pour influencer Wikipédia

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« Le Point » s’est glissé dans une formation à Wikipédia organisée par le collectif Urgence Palestine. Ou comment militer en mimant la neutralité.
Depuis sa création en 2001, Wikipédia défend la neutralité de point de vue. Hélas, les articles qui alertent sur le parti pris militant de certains contributeurs se succèdent, mais la Fondation Wikimédia les relativise, et persiste à minimiser le militantisme. Ce serait un épiphénomène.
Que penser alors de cette annonce, relayée sur les canaux de discussions internes de l’encyclopédie, proposant des formations pour « rejoindre le club des contributeurs de la Palestine » ? Datée du 12 octobre, elle émanait du collectif ultramilitant Urgence Palestine, antisioniste et radical.
Ce dernier entend rendre opérationnelle une escouade de nouveaux rédacteurs chargés de transmettre, affirment-ils, un « savoir non biaisé ». Dans l’esprit, Urgence Palestine ressemble plutôt à « totalement à charge contre Israël ». « Ensemble, appliquons les principes éthiques de Wikipédia et ceux de la résistance palestinienne pour une encyclopédie où la justice triomphe », expliquait l’annonce, toujours disponible sur un site de formulaire en ligne…
Inscription incognito
Pour en avoir le cœur net, le plus simple consistait à s’inscrire incognito à cette formation. J’opte pour un profil estudiantin en histoire, qui souhaite se mobiliser contre le sionisme.
Deux jours plus tard, un certain Bader me répond poliment. J’arrive un peu tard, mais une « session de rattrapage » est prévue prochainement. « On compte sur toi », insiste-t-il en me fournissant un lien de connexion. Il exige plusieurs informations. Prénom, nom, code postal, numéro de téléphone, et surtout la manière dont j’ai entendu parler de cette formation. Je reste évasive sur la dernière réponse.
Nous sommes quatre à suivre la session de rattrapage de Bader, qui se présente immédiatement comme « militant d’Urgence Palestine », mais aussi « grand fan de Wikipédia ».
La neutralité à la mode antisioniste
Le formateur insiste pour que nous soyons parfaitement visibles à la caméra. « On a besoin d’identifier toutes les personnes, c’est un sujet sensible », martèle-t-il. Nous nous présentons chacun notre tour. Parmi nous, une chercheuse au CNRS et une membre de BDS, alias Boycott Désinvestissement Sanction. Ce mouvement incite au boycott de produits et de personnalités en lien de près ou de loin avec Israël. Bader suit attentivement, pose quelques questions.
Sitôt le tour de table fini, il nous invite à créer un compte sous pseudonyme pour préserver notre anonymat. Bader nous présente ensuite le « Projet Palestine » proposé par la plateforme. Mais d’abord, il nous parle de la « neutralité de points de vue » attendue par l’encyclopédie en ligne.
En étant neutre, on est du côté palestinienBader, formateur
En partant de la page dédiée à la mort de Yahya Sinwar, chef du bureau politique du Hamas tué le 16 octobre 2024, Bader tente de nous montrer les différentes opinions des contributeurs de tous bords. En fin connaisseur, le militant nous explique que si l’on veut « faire sauter une modification », on doit cibler le choix des sources, qu’elles soient primaires, secondaires ou tertiaires.
Décrédibiliser les sources contrariantes
Je prends le risque de lui demander innocemment si tous les médias peuvent être des sources fiables. Non, bien entendu. Pour en décrédibiliser une, le mieux est de « rappeler que les sources choisies sont par exemple d’extrême droite fasciste », me répond posément Bader. « Sur la Palestine comme dans la vie aujourd’hui, tu dois être dans les clous, sinon tu te fais taper sur les doigts. » Il insiste sur l’importance de prendre parti sans en avoir l’air, afin d’influencer le lecteur en quête de neutralité.
« Tu vas devoir policer ton discours », précise Bader. « Wikipédia te donne un espace commun, tu le partages avec des sionistes, avec des racistes, mais comme dans la société, il y a des règles sur lesquelles on va jouer. » Il semble croire lui-même à sa propre propagande. La plupart du temps, précise-t-il, « en étant neutre, on est du côté palestinien ». Comme exemple de média impartial sur le sujet, il conseille… L’Humanité, titre communiste historiquement et indéfectiblement propalestinien.
Il nous donne des astuces pour « faire sauter » des sources journalistiques qui ne sont pas dans sa ligne, en contestant leur fiabilité ou les accusant de parti pris. Un classique. Comme le révélait une enquête du Point, la fiche Wikipédia de l’hebdomadaire, tout comme celles de plusieurs de ses journalistes, est la cible de contributeurs, qui tentent depuis des années d’attaquer sa fiabilité. « On peut utiliser cet argument pour faire sauter des informations, même quand elles sont neutres », confie Bader sans détour.
Créer un profil lisse et expérimenté
Après ce long échange, le formateur militant nous propose de passer à une partie cruciale de notre formation : se créer une crédibilité en tant que contributeur expérimenté pour modifier ensuite des articles sur la Palestine. Bader précise que sur la plateforme, ceux qui rédigent ne sont pas égaux. « Plus tu accumules de l’édition, plus tu acquiers de l’expertise et de la compétence et donc une reconnaissance. »
L’une des participantes, Caroline, l’interroge franchement : « Comment peut-on feindre la neutralité ? » Réponse : il ne faut surtout pas se présenter comme militant. Pour « crédibiliser un compte », explique Bader, il faut avoir un profil lisse, dénué d’accointances trop flagrantes avec le sujet afin d’influencer subtilement le narratif. « Tu fais un peu de Palestine, hop, tu fais une petite pause, tu fais une modification ou deux, tac-tac, et tu reviens sur la Palestine après. » Nous commençons donc sous son regard avisé à modifier des pages anodines, sans aucun rapport avec la Palestine, pour apprendre les bases et banaliser nos profils.
D’après Bader, jusqu’à présent, aucun groupe structuré français ne travaille sur la Palestine, contrairement à « l’autre côté » à savoir Israël, qui serait « organisé ». Sur le Wikipédia anglophone, les propalestiniens sont « plus nombreux, ils ont fait l’objet d’attaques, ils ont été ciblés, mais ils réussissent », précise Bader. Le Jerusalem Post révélait le 12 décembre que des contributeurs propalestiniens ont été suspendus après avoir coordonné en coulisses le ciblage de pages de l’encyclopédie participative. Aucun groupe de rédacteurs organisé pro-israélien n’a pour le moment été dénoncé.
Leçons bien apprises
Dans les jours qui ont suivi la formation, j’ai constaté que mes « collègues » ont appliqué les méthodes apprises durant la soirée, comme en attestent leurs historiques de modifications de pages, sous des pseudonymes comme « Rustine44 » ou « NR25500 ».

Contacté par Le Point, sans préciser que nous avions participé incognito à sa formation, Bader a affirmé animer un simple « regroupement informel de citoyens pour l’entraide, la pédagogie et la formation aux principes et à l’édition de Wikipédia ». Il n’a pas précisé que le collectif Urgence Palestine était à la manœuvre. Il évoque une démarche indépendante « de toute organisation politique ou associative » et dénonce « les organisations pro-israéliennes » qui tenteraient de biaiser l’encyclopédie à des fins de propagande et de censure pro-israélienne.
Tout cela en citant comme source un site… lancé en 2001 par quatre militants pour les droits des Palestiniens, répondant au nom sans équivoque d’ « electronic Intifada ». Dans l’un des articles de ce site, on lit par exemple qu’Israël n’aurait « toujours pas retrouvé de victimes de viol » lors du pogrom du 7 octobre 2023. Voilà donc les « sources fiables » de celui qui prétend former toutes les semaines de futurs rédacteurs pour l’encyclopédie en ligne…
Source
Le Point

happywheels

2 Commentaires

  1. joseparis dit :

    Oh les belles têtes de haineux d’urgence fakestine. Ils peuvent faire ce qu’ils veulent, les français s’en branlent complètement de la palestine. Ils ont bien compris que le problème c’était eux et leur idéologie nazislamiste mortifère véhiculée par les députés islamo-racaille et l’affront populaire.

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