Luc Ferry : «Retour sur l’affaire Sarah Halimi»

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CHRONIQUE – Cet horrible meurtre, intrinsèquement lié à la haine des Juifs omniprésente dans l’islam radical, vient rappeler que l’antisémitisme a largement changé de visage en France, dans un silence incompréhensible.
Je ne vais pas rappeler les faits qui ont entouré la mort atroce de Sarah Halimi. Ils sont maintenant publics et leur analyse ne laisse aucun doute sur le caractère antisémite d’un meurtre commis sous l’emprise d’un délire qui n’a fait que porter à son point d’incandescence la haine des Juifs omniprésente dans l’islam radical. Me Goldnadel a eu raison de dire que «l’assassin présentait le profil classique des criminels islamistes ordinaires». Je me souviens qu’en 2003, lorsque je portais la loi sur l’interdiction des signes religieux ostentatoires à l’école, j’ai un jour déclaré devant l’Assemblée nationale, en réponse à une question d’actualité, que l’antisémitisme avait changé de visage, qu’il n’était plus tant le fait d’un catholicisme réactionnaire, pas même celui d’une extrême droite qui s’en détachait peu à peu, que de l’islamisme radical. Je me souviens encore du visage déformé par la colère de ce parlementaire de gauche qui me traitait en hurlant de «salopard!» (sic), furieux qu’il était qu’on lui ôte son adversaire favori (le FN), scandalisé aussi qu’à ses yeux mes propos soient une insulte au «colonisé», ce qui était évidemment absurde: je n’ai jamais confondu l’islam des Lumières cher à mon ami Malek Chebel et l’islamiste fanatique. Aujourd’hui, une récente une (le 27 septembre 2017) de L’Expressconsacrée aux nouveaux visages de l’antisémitisme, titrait tout simplement: «Dans les quartiers, les Juifs sont la cible de l’islam radical», comme si cette vérité allait désormais de soi, malgré les efforts désespérés de l’islamosphère pour l’ensevelir.
Le mélange d’imbécillité et de sauvagerie qui a caractérisé le meurtre de Sarah Halimi m’a plongé dans un état de sidération. J’ai été abasourdi que tant de médias aient à ce point passé sous silence le martyre de cette femme torturée pendant une heure avant d’être défenestrée, qu’on ait tenté de cacher le caractère évidemment antisémite de cette abomination, le tout, comme d’habitude, pour sacrifier à la sacro-sainte «lutte contre les amalgames». Faudra-t-il en son nom couvrir toutes les ignominies commises au nom de la religion? Invité le 12 octobre 2010 à prononcer la conférence inaugurale lors du cent cinquantième anniversaire de la création de l’Alliance israélite universelle, j’avais déjà rappelé comment les visages anciens de l’antisémitisme s’étaient en France assez largement estompés depuis la Deuxième Guerre mondiale, comment aussi, d’autres avaient hélas pris la relève, dont il fallait enfin parler sans fard. Ce qui, d’abord, n’est plus guère que résiduel, c’est l’antisémitisme chrétien, mais c’est aussi largement le cas de l’antisémitisme exterminateur, racialiste et nationaliste, celui de Drumont, de l’Europe des années 1930 et du nazisme.
Les années 1970-80 virent hélas apparaître un troisième antisémitisme, celui qui vient de l’islamisme, mais aussi d’une partie non négligeable de l’extrême gauche
Les années 1970-80 virent hélas apparaître un troisième antisémitisme, celui qui vient de l’islamisme, mais aussi d’une partie non négligeable de l’extrême gauche. Sous l’alibi de l’antisionisme, il défend encore aujourd’hui les thèses négationnistes et accuse Israël et ses «suppôts» d’organiser le retour du «grand Satan colonialiste». Ce que l’épisode Dieudonné a dévoilé plus récemment encore, en prenant lui aussi le prétexte de la lutte «antisioniste», c’est l’existence d’un quatrième antisémitisme. Né dans années 1970 aux USA avec Nation of Islam, le mouvement de Louis Farrakhhan (le «Hitler noir»), il s’enracine dans la concurrence des mémoires douloureuses. Ces analyses que j’avais présentées il y a plus de dix ans se sont trouvées largement confirmées par une toute récente étude de la Fondation pour l’innovation politique intitulée «Violence antisémite 2005-2015» et publiée en septembre 2017. Portant sur sept pays, elle conclut que «c’est en France que l’exposition des Juifs à la violence antisémite semble la plus forte. Quant aux auteurs des actes antisémites violents, les données disponibles montrent en Europe de l’Ouest la prédominance de personnes de culture musulmane et la quasi-disparition de l’extrême droite…».
Si le nazisme, hélas, nous a appris une chose, c’est que le pays le plus cultivé du monde pouvait massivement adhérer à la politique la plus atroce que l’humanité ait connue. Ben Laden n’était pas, lui non plus, un inculte, ni les leaders du FIS, ni même ceux du Hamas, et c’est cela peut-être le plus inquiétant dans l’affaire: la culture ne garantit pas le recul de la barbarie. Seule l’éducation morale dispensée dans les familles à quelque chance d’y parvenir. Encore faudrait-il qu’elles le veuillent…
Source :
http://premium.lefigaro.fr/vox/societe/2017/11/15/31003-20171115ARTFIG00244-luc-ferry-retour-sur-l-affaire-sarah-halimi.php

happywheels

3 Commentaires

  1. Laurence Salmon dit :

    C ça depuis des années et ça s empli fier avec le tps

  2. Maguid dit :

    Pourquoi « RADICAL »? C’est encore une manière de mentir, d’édulcorer; c’est insupportable.

  3. Maguid dit :

    Là encore, il récidive, puisqu’il parle de l’islamisme radical; c’est toujours dans le même esprit de soumission (d’ailleurs, il paraît que islam signifie soumission). Si il était un peu lucide il aurait arrêter son propos à islam, sans rajouter « isme radical ».

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