L’oeuvre de Lucien Rebatet, thuriféraire du nazisme, sort des décombres
«Fallait-il republier ça?», demande l’historien Pascal Ory dans sa remarquable préface ouvrant la réédition de la version originale et intégrale des «Décombres», le livre-phare de Lucien Rebatet, écrivain fasciste et antisémite, thuriféraire français du nazisme.
Assurément oui répond en substance l’historien, spécialiste de la Collaboration. «Soixante-dix ans après l’ouverture des camps, soixante-dix ans après le suicide d’Adolf Hitler, c’est de ne pas publier (les oeuvres de Rebatet) qui devrait surprendre, qui devrait inquiéter», soutient Pascal Ory.
Le «Dossier Rebatet», publié jeudi prochain dans la collections Bouquins des éditions Robert Laffont est strictement encadré par un appareil critique d’une rigueur exceptionnelle de l’historienne Bénédicte Vergez-Chaignon. Il permet de lire «en connaissance de cause» ces pages ignobles.
Ne pas ressortir, «en version commentée», le livre le plus remarqué de la Collaboration «aurait été faire acte de censure», fait remarquer Pascal Ory.
«L’attitude défensive à l’égard d’un idéologue extrémiste recouvre une crainte, donc un aveu: que la +mauvaise parole+ ait en soi une capacité de nuisance intacte, face à laquelle la seule solution serait le bâillon», insiste-t-il.
Outre «Les décombres», récit aussi passionnant du point de vue historique qu’abject, «Le dossier Rebatet» (titre de l’ensemble du volume) comprend «L’inédit de Clairvaux», écrit durant les années d’incarcération de Lucien Rebatet après la guerre et qui décrit le monde de la Collaboration jusqu’en 1944, des extraits du dossier d’instruction devant la Cour de justice en 1945, des articles de presse durant son procès en 1946, les lettres d’intellectuels et d’artistes, dont Albert Camus, François Mauriac et Paul Claudel, demandant sa grâce après sa condamnation à mort et le verbatim d’une «radioscopie» avec Jacques Chancel diffusée sur France Inter en 1969, trois ans avant la mort, dans son lit, de l’un des principaux rédacteurs de l’hebdomadaire farouchement antisémite et pro-nazi «Je suis partout».
Pavé de 670 pages, «Les décombres» a été publiée pour la première fois en août 1942. Ce long pamphlet haineux contre la République, les communistes, l’Eglise et les Juifs a été un incontestable succès de librairie. Qualifié de «best-seller» de l’Occupation, le livre fut tiré à 65.000 exemplaires, un chiffre énorme compte tenu de la pénurie de papier.
Ce bouquin rempli de haine n’avait été réédité qu’une seule fois, à la fin des années 1970 dans une version expurgée, sous le titre «Les mémoires d’un fasciste».
Fasciste sans remords ni regrets, antisémite virulent, Lucien Rebatet aspirait à devenir un grand écrivain. Sa plume, vive et incisive, n’est pas sans rappeler celle du pamphlétaire Léon Bloy.
Lorsqu’il dépeint la débâcle de juin 1940 c’est avec une grande puissance d’évocation. Mais Rebatet n’utilise son talent littéraire qu’au service de la haine. Ainsi, le portrait qu’il dresse de François Mauriac (un homme qui prendra sa défense après sa condamnation à mort) est d’une ignominie totale et constitue rien de moins qu’un appel au meurtre.
Avant la libération de Paris, Lucien Rebatet fuit vers l’Allemagne. A Sigmaringen, refuge des derniers «collabos», il se montre lâche et peu courageux. Arrêté par les autorités militaires alliés le 8 mai 1945, il est remis aux autorités françaises qui l’inculpent pour trahison (l’excitation à la haine raciale ne figure pas encore dans le code pénal français).
Condamné à mort en novembre 1946, il est gracié en avril 1947 et sa peine commuée en travaux forcés à perpétuité. Une loi d’amnistie générale le remet en liberté en 1952.
Dans «L’inédit de Clairvaux», publié pour la première fois, on découvre un homme aigri, sans la moindre ombre sur une conscience qu’on dirait absente.
A la fin de sa vie, au micro de Jacques Chancel, Lucien Rebatet, persiste. «Je me suis battu pour la cause que je croyais bonne», dit-il.
Avant de mourir, en 1972, il écrira deux romans, «Les deux étendards» et «Les épis mûrs» qui n’ont pas eu de succès. Il écrira également «Une histoire de la musique» qui continue en revanche d’être un livre de référence même s’il paraît aujourd’hui très daté.
source :
http://www.paris-normandie.fr/detail_article/articles/4136621/l-oeuvre-de-lucien-rebatet-thuriferaire-du-nazisme-sort-des-decombres#.Vg14mPntlBc
relire l’article mis en ligne sur le site de la LDJ le 11 Avril 2015 : LE BEST SELLER ANTISEMITE DE 1942 » LES DECOMBRES » REEDITE INTEGRALEMENT
Qu’il brûle en enfer.
happywheels
Qu’il continue de brûler en enfer…
Mourir en en enfer serait trop doux pour une sale ordure de cet acabit.
Ce qui est inadmissible au regard de la publication de ces textes délétères est qu’elle se fait dans un climat qui l’est aussi.
Elle interrogerait moins, sans doute, sur l’antisémitisme contemporain, si elle en était déconnectée … Or ce n’est pas les cas !