L’édition critique de « Mein Kampf », best-seller caché de l’été
« Historiciser le mal », publié par les éditions Fayard, était sorti début juin. Les ventes, tenues secrètes, sont plus que conséquentes…
Par François-Guillaume Lorrain
Presque trois mois après sa sortie, Historiciser le mal, l’édition critique et scientifique de Mein Kampf publiée par les éditions Fayard, va franchir le cap des 9 000 exemplaires. Un chiffre déjà conséquent pour un livre d’histoire, compte tenu surtout de son prix de vente dissuasif, 100 euros. Malgré le choix d’une stratégie anti-commerciale pour cet ouvrage si particulier, Fayard a dû faire face à une exposition médiatique très forte durant le premier mois, en juin. Les librairies, à qui Fayard avait envoyé des brochures demandant dans l’idéal de ne pas mettre le livre en devanture ou en vente directe dans leurs locaux – toutes n’ont pas respecté la consigne –, ont été sollicitées par de nombreux clients. Résultat : le tirage initial de 10 000 exemplaires a été quasiment épuisé au début du mois de juillet et durant presque tout l’été. Les éditions sont rentrées dans leurs frais et tous les droits sont désormais versés à la Fondation Auschwitz-Birkenau.
Comment réagit la maison d’édition à ce résultat ? « Nous sommes satisfaits parce que c’est une reconnaissance du travail des historiens, parce que les journalistes, les représentants, les libraires ont compris aussi notre démarche », commente Sophie Hogg, directrice éditoriale de Fayard. Seul bémol : une déception à l’égard des bibliothèques universitaires, relais majeurs de la transmission du savoir, à qui l’ouvrage était offert si elles en faisaient la demande. Très peu l’ont faite. Parmi les 1 000 bibliothèques – à comparer avec le chiffre global de 25 000 installées dans l’Hexagone – qui ont émis le souhait de recevoir le livre, la plupart étaient issues de CDI de collèges ou lycées, de bibliothèques municipales, départementales, de médiathèques, d’institutions liées à la résistance, à la guerre ou au judaïsme (le Centre de la Mémoire d’Oradour-sur-Glane ou les Archives consistoriales par exemple). « Est-ce un effet du Covid, des universités qui étaient fermées ? Nous verrons bien à la fin septembre. »
Ces jours-ci, Fayard a décidé de relancer un second tirage de 10 000 exemplaires. « De même que nous avions longuement hésité avant le premier tirage : 6 000 ? 8 000 ? 10 000 ? Là encore, nous nous sommes interrogés. » Précisons que de nombreuses enseignes n’ont pas été desservies, Auchan, Leclerc, Carrefour…, afin de ne pas trop mettre en évidence le livre. C’est l’une des mesures qui témoignent d’un traitement de l’ouvrage exceptionnel, car anti-commercial. Pas de promotion et la consigne à l’enseigne Fnac de ne pas le placer sur les listes de ses meilleures ventes, afin d’éviter le système habituel de recommandation. L’enseigne a été ainsi invitée à casser l’algorithme qui génère d’ordinaire des suggestions d’achat dès que l’ouvrage grimpe dans les classements. De même, si le client se rend sur le site de la Fnac – mais cela vaut aussi pour Amazon – est-il accueilli par une page de mise en garde. Jusqu’où ira cet ouvrage à nul autre pareil ? Il se pourrait bien qu’il finisse sa course l’an prochain aux alentours de 20 000 exemplaires. Un résultat plus qu’appréciable.
Source
https://www.lepoint.fr/histoire/l-edition-critique-de-mein-kampf-best-seller-cache-de-l-ete-25-08-2021-2440100_1615.php
Le livre va être sur la liste du père noël de tous les nazillons. ça va faire bien dans la bibliothèque du salon.