«Le Mossad doit faire payer les meurtriers»: David Barnea, le maître-espion derrière l’élimination d’Hassan Nasrallah
Par Jean-Marc Gonin
Le directeur du Mossad David Barnea (à gauche) au quartier général de Tsahal, à Tel Aviv, le 23 octobre
Déjà amplement pourvue en opérations rocambolesques, la légende du Mossad, le service secret extérieur israélien, vient de s’enrichir d’une nouvelle page. L’assassinat du secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah ainsi que l’élimination de l’ensemble du commandement militaire de l’organisation chiite libanaise, lors d’un bombardement aérien sur le quartier de Dahiya au sud de Beyrouth, sont venus couronner une dizaine d’années de travail de l’agence de renseignement. Et elle porte la signature de son directeur : David Barnea.
À la tête du Mossad depuis le 1er juin 2021, nommé par Benyamin Netanyahou, cet agent chevronné âgé de 59 ans a passé près de trente ans dans ce service. Affecté à la division Tzomet, chargée de gérer et de recruter des agents dans le monde entier, il en gravit les échelons avant de la diriger, prélude à sa promotion en 2019 au rang de numéro deux de l’institution. Au cours de sa longue carrière, « Dadi », comme on le surnomme, s’est surtout focalisé sur l’ennemi principal d’Israël : la république islamique d’Iran. Ce qui l’a également amené à lutter contre son allié libanais, le Hezbollah, financé et armé par Téhéran. Autant dire que David Barnea a dû considérer le coup porté à cette organisation vendredi 27 septembre comme l’aboutissement d’années d’efforts.
Informateurs sur le terrain
Certes, c’est bien l’aviation de Tsahal qui a écrasé le pâté de maisons de Beyrouth-sud où se réunissaient les caciques du parti de Dieu, sous une pluie de 85 bombes de 900 kilos chacune. Certes, ce sont les unités du renseignement militaire qui ont localisé ces immeubles et les ont désignés comme cibles à l’armée de l’air. Mais c’est bien un – ou plusieurs – informateur(s) sur le terrain qui a (ont) averti de l’arrivée et de la présence de Nasrallah et de ses commandants, information qui a provoqué le feu vert pour le bombardement fatal. Et ce(s) guetteur(s) avai (en)t été recruté(s) par la division Tzomet.
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Il peut paraître étrange, voire irresponsable, que le Hezbollah ait décidé de réunir cet aréopage dans un bunker alors qu’Israël avait déjà lancé une vague de bombardements au Sud-Liban. Mais il ne faut pas oublier que les jours précédents, des centaines de membres du Hezbollah étaient tombés, victimes de bipeurs et de talkies-walkies piégés. Une opération qu’Israël n’a pas revendiquée mais que le monde entier attribue au Mossad. Ainsi privés de communications sûres par l’explosion de ces appareils et alors que Tsahal semblait préparer une opération terrestre, les commandants du Hezbollah, Nasrallah en tête, ont été obligés de convoquer à la hâte une réunion à Dahiya pour discuter de stratégie. C’est ainsi que le piège tendu par David Barnea et le renseignement militaire israélien s’est refermé sur eux, les engloutissant dans les décombres de leur abri souterrain.
Avant d’accéder à la direction du Mossad, « Dadi » avait porté de rudes coups à l’Iran. On lui attribue notamment la supervision de l’assassinat, le 27 novembre 2020, de Mohsen Fakhrizadeh, haut responsable du programme nucléaire militaire iranien. Selon le Jerusalem Post, il avait été tué au volant de sa voiture sur une route à une cinquantaine de kilomètres de Téhéran. Cachée dans une camionnette garée sur le bas-côté, une mitrailleuse télécommandée depuis Tel Aviv aurait déclenché le tir fatal.
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En janvier dernier, lors des obsèques d’un ancien directeur du Mossad, David Barnea a promis aux victimes israéliennes du 7 octobre que leur mort serait vengée, évoquant la « colère de Dieu ». En citant ce nom, « Dadi » faisait référence aux suites de l’attentat de Munich qui coûta la vie à 11 athlètes israéliens. Le Mossad monta alors une opération, rendue célèbre par le film de Steven Spielberg, visant à retrouver et éliminer tous les terroristes mêlés à cette tragédie. « Le Mossad aujourd’hui, comme il y a cinquante ans, a-t-il déclaré, doit faire payer les meurtriers qui ont envahi la zone frontalière de Gaza – ceux qui ont planifié cette action et ceux qui les ont envoyés. » Les patrons du Hamas en exil sont avertis.
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Source
Le Figaro