L’architecte nazi qui fait polémique au musée des Arts Déco
D’Elodie Emery
Depuis le mois d’octobre, le musée des Arts Décoratifs à Paris présente une exposition sur l’école artistique du Bauhaus. A la fin du parcours, un planisphère intitulé « L’héritage du Bauhaus » indique quelques-unes des réalisations des élèves du mouvement, parmi lesquelles… le camp d’extermination d’Auschwitz. Mentionné sans plus d’explication, au même titre qu’un campus universitaire ou une station de ski.
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La queue est compacte devant le musée des Arts Décoratifs, rue de Rivoli à Paris. A l’intérieur, Parisiens, touristes et groupes scolaires se pressent pour admirer l’exposition « L’esprit du Bauhaus ». Cette grande rétrospective, la première depuis 1969, apprend-on, retrace l’histoire cette école artistique extraordinairement novatrice, fondée en 1919 à Weimar, en Allemagne.
On y admire du mobilier, des objets du quotidien, des textiles, des photos et des toiles. Plus de 700 oeuvres qui rendent compte du foisonnement créatif d’un mouvement qui voulait « rendre vie à l’habitat et à l’architecture au moyen de la synthèse des arts plastiques, de l’artisanat et de l’industrie », explique le dépliant de l’exposition. Les visiteurs qui observent d’un peu trop près les divers objets exposés à fin du parcours déclenchent toutes les deux minutes l’alarme qui les protège, ce qui occasionne un début d’embrouille avec une gardienne. C’est pourtant une toute autre installation qui soulève aujourd’hui une polémique – bien plus délicate.
A quelques mètres de là, un planisphère intitulé « l’héritage du Bauhaus » indique les lieux où se sont tenues les expositions majeures et les grandes réalisations architecturales des disciples du mouvement. « Paris, 1953 : siège de l’Unesco par Marcel Breuer »,« Nigeria, 1961-1962, Arieh Sharon construit le campus de l’université de Ife »… Et soudain : « Auschwitz, 1940 : Fritz Ertl participe à la conception du camp de concentration ». Etudiant au Bauhaus de 1928 à 1931, devenu SS pendant la guerre, Fritz Ertl a effectivement dessiné les baraquements du camp d’extermination en Pologne. Voir sa « réalisation » figurer aux côtés d’une station de ski en Haute-Savoie et d’une expo au MoMa de New-York est loin d’être du goût de tout le monde.
Fritz Ertl Waffen SS 1938
Fritz Ertl 1972
« Je ne comprends pas ce qui peut pousser un commissaire d’exposition à mentionner la « création » d’Auschwitz et le dessin des fours crématoires de Birkenau au même titre que les autres hommes qui sont cités dans cette exposition et qui ont participé à l’héritage de cette fabuleuse école à travers des œuvre magistrales », s’émeut un architecte qui a contacté Marianne après avoir vu l’expo, nous indiquant que l’information circule dans la profession et sème la stupéfaction. Un autre visiteur a pour sa part directement envoyé un courrier à la direction du musée pour exprimer son indignation, non sans avoir publié au préalable quelques commentaires virulents sur Internet : « Faire figurer Auschwitz parmi les lieux témoignant de « l’héritage du Bauhaus » est une véritable monstruosité », s’offusque cet homme dont le père était un élève de l’école.
« Maladresse »
Anne Monier et Olivier Gabet, tous deux commissaires de l’exposition se disent « choqués de voir cette polémique émerger et prendre un tel virage », tout en reconnaissant timidement une « maladresse ». « Le nom d’Auschwitz est en italique, c’est le choix graphique que nous avons fait pour le singulariser. Nous n’avons pas voulu que ce soit écrit de la même façon que le reste, précisent-ils. Mais certains élèves ont flirté avec des idéologies totalitaires, l’historien de l’architecture Jean-Louis Cohen le raconte très bien ». Contacté par Marianne, Jean-Louis Cohen confirme qu’il s’agit bien d’une « vérité historique ». Qui aurait sans doute mérité qu’on s’y attarde un peu plus ? Pour justifier leur parti-pris, les commissaires affirment qu’une explication de plus pour détailler « la face sombre » de l’héritage du Bauhaus aurait rendue l’exposition trop longue pour le visiteur.
« Ce qui est choquant et difficilement compréhensible, c’est de présenter les choses de cette façon : ça fait un trou dans le mur », ajoute Jean-Louis Cohen. Forcé de réagir à la controverse, le musée des Arts Déco annonce pour finir qu’un texte explicatif est en préparation, pour colmater la brèche.
Source :
http://www.marianne.net/architecte-nazi-qui-fait-polemique-au-musee-arts-deco-100248541.html
Interdite par le pouvoir nazi, l’école d’art allemande est souvent érigée en symbole de résistance. Pourtant, la réalité se révèle moins brillante, certains de ses cadres ayant tenté de s’accommoder du nouveau régime, quand d’autres l’ont franchement soutenu.
C’est la saison du Bauhaus, avec une grande exposition au musée des Arts décoratifs à Paris, et une autre au Centre Pompidou Metz sur le chorégraphe Oskar Schlemmer, l’une des figures de cette célèbre école allemande d’art, de design et d’architecture.
Symbole du modernisme, le Bauhaus l’est d’autant plus que les nazis, le considérant comme un foyer de subversion « judéo-bolchevique », l’ont fermé en 1933. Tout en acceptant aussitôt de le réouvrir à condition de renvoyer quelques enseignants, dont Kandinsky, ce que son dernier directeur, Ludwig Mies van der Rohe, a refusé de faire.
Nombre de membres du Bauhaus ont alors dû quitter l’Allemagne ou ont été interdits de travailler. Il est dont d’autant plus choquant, et difficilement compréhensible, d’apprendre que certains ont tenté de s’accommoder du nouveau régime, quand d’autres l’ont franchement soutenu, pensant que la « modernité » des formes était compatible avec l’esthétique monumentale et glacée du national-socialisme. Ce qui s’est produit plus souvent qu’on ne l’a dit. L’attitude de ces artistes n’est pas représentative de celle des plus de mille deux cents étudiants passés par l’école. Mais elle pose question, d’autant qu’elle concerne quelques-uns des principaux responsables du Bauhaus. En complément des deux expositions, bien peu disertes sur le sujet, résumé de quelques trajectoires (liste non exhaustive).
Alfred Arndt (1896-1976)
Etudiant au Bauhaus de 1921 à 1929. En 1930, nommé par Hannes Meyer au poste de directeur du département d’architecture intérieure. Quitte le Bauhaus en 1932. Adhère au parti nazi en 1937. Chef de la propagande de la ville de Probstzella, en Thuringe.
Herbert Bayer (1900-1985)
Graphiste. Dirige l’atelier de typographie au Bauhaus de 1925 à 1928. Après 1933, conçoit des documents et des affiches de propagande pour le régime national-socialiste, dans le style du Bauhaus. Réalise en particulier une plaquette publicitaire pour la firme d’aéronautique militaire Heinkel, dont les usines d’Oranienburg sont construites par l’architecte moderniste Herbert Rimpl. Rejoint les Etats-Unis en 1938.
Friedrich Engemann (1898-1970)
Etudiant au Bauhaus de 1927 à 1929, puis professeur de dessin architectural jusqu’en 1933, année où il adhère au parti national-socialiste. Directeur du département Bois à l’école technique de Dessau en 1939. Devient l’un des responsables culturels de la RDA après 1945.
Fritz Ertl (1908-1982)
Cet Autrichien étudie l’architecture au Bauhaus de 1928 à 1931. Pendant la guerre, devenu membre des Waffen-SS, il dessine les plans des baraquements du camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau.
Walter Gropius (1883-1969)
Architecte, fondateur du Bauhaus en 1919. Démissionne en 1928. En 1933, adhère à la Chambre de la culture du Reich fondée par Goebbels, et participe au concours de la Reichsbank organisé par le nouveau pouvoir national-socialiste. En 1934, il dessine un pavillon pour l’exposition de propagande “Peuple allemand-Travail allemand”. La même année, Gropius conçoit aussi, dans un style moderniste, la Maison du travail allemand à Berlin, un projet refusé par Hitler. Selon l’historien américain Jonathan Petropoulos, Gropius participe la même année au pavillon allemand de la Triennale de Milan. Faute de commande, il déménage en Grande-Bretagne en 1934, mais retourne plusieurs fois en Allemagne avec l’intention d’y réouvrir son agence. Emigre définitivement aux Etats-Unis en 1937. Par ailleurs, sa correspondance montre que Gropius était antisémite.
Ludwig Mies van der Rohe (1886-1969)
Architecte, directeur du Bauhaus de 1930 à 1933. Fait expulser par la police les étudiants communistes. Négocie sans succès avec les nazis pour obtenir la réouverture du Bauhaus. En 1933, son projet moderniste pour la Reichsbank n’est pas retenu. Signe une déclaration de soutien à Hitler et adhère à la Chambre de la culture du Reich. Dessine le pavillon de l’industrie minière à l’exposition “Peuple allemand-Travail allemand”. Propose un pavillon pour l’Exposition internationale de Bruxelles de 1935, rejeté par Hitler, qui piétine la maquette. Il quitte l’Allemagne pour les Etats-Unis en 1938.
Ernst Neufert (1900-1986)
Formé au Bauhaus de Weimar en 1919-1920, il est l’un des adjoints de Gropius. Au début des années 1920, travaille sur la modification de l’usine Fagus, conçue par Gropius en 1911. Architecte d’exécution sur le Bauhaus de Dessau en 1925-26, ainsi que sur les maisons des maîtres. Moderniste, Neufert enseigne l’architecture à l’école de Weimar qui succède au Bauhaus en 1925. Fasciné par Le Corbusier, il lui écrit pour recommander un élève souhaitant faire un stage dans son agence parisienne. En 1936, Neufert publie Les Eléments des projets de construction, guide de rationalisation de l’architecture, édité quatorze fois en Allemagne et onze fois en France (dernière édition chez Dunod-Le Moniteur), toujours en vente et utilisé aujourd’hui par la plupart des agences d’architecture dans le monde. De 1938 à 1945, Neufert est chargé de standardiser la construction dans l’équipe d’Albert Speer, architecte officiel du IIIe Reich. En 1943, dans son essai Bauordnungslehre (La Coordination dimensionnelle dans la construction, Dunod, 1967 pour l’édition française), préfacé par Albert Speer, alors ministre de l’Armement et de la production de guerre, Neufert précise ses conceptions par un système de mesure modulaire nommé Oktameter. Son modèle de référence est un homme blond de 1,75 mètre. Destinée à accélérer la construction sur les territoires conquis à l’Est par les nazis, la mesure octamétrique deviendra une norme DIN (Deusches Institut für Normung – lire Architecture en uniforme, projeter et construire pour la Seconde Guerre mondiale, de Jean-Louis Cohen, p. 310-311). Sa grille de 2,50 mètres « a été jusqu’à aujourd’hui la base pour dessiner et construire les bâtiments industriels » (Annett Zinsmeister, Virtual Constructions, The Standards of Utopia, Thesis, Wissenschaftliche Zeitschrift der Bauhaus-Universität Weimar, 2003).
Lilly Reich (1885-1947)
Lilly Reich rencontre Mies van der Rohe en 1926 et devient sa plus proche collaboratrice. Il la nomme directrice du département de second œuvre et de l’atelier textile en 1932. En 1934, elle participe à l’exposition “Peuple allemand-Travail allemand”. En 1937, Lilly Reich est chargée avec Mies van der Rohe de l’exposition sur l’industrie allemande du textile et de l’habillement à Berlin, présentée aussi au pavillon allemand de l’Exposition internationale de Paris la même année. Reste en Allemagne après le départ de Mies en 1938. Enrôlée de force dans l’Organisation Todt.
Hinnerk Schepper (1897-1957)
Etudie au Bauhaus de 1919 à 1922, puis est nommé directeur de l’atelier de peinture murale de 1925 à 1933. Réalise la mise en couleurs du Bauhaus de Dessau. Selon l’historien américain Jonathan Petropoulos, Schepper peint des fresques de propagande après 1933. Hermann Göring lui en commande une pour sa villa.
Oskar Schlemmer (1888-1943)
Maître de forme au Bauhaus de 1923 à 1929. Chorégraphe, metteur en scène de l’école et peintre. Selon un documentaire diffusé par Arte en 2014, il est rejeté par ses collègues en raison de ses sympathies nationales-socialistes, et quitte le Bauhaus pour l’école d’art de Breslau. Les archives du Bauhaus indiquent qu’il adhère à La Chambre de la culture du Reich. En 1934, il participe à un concours pour une fresque à la Maison de l’art allemand de Munich : une foule de personnages faisant le salut nazi. Projet refusé. Selon l’historien de l’art Eric Michaud, Schlemmer écrit à Goebbels pour l’assurer de son soutien au national-socialisme. Il est pourtant classé « artiste dégénéré » et interdit d’exercer.
Lothar Schreyer (1886-1966)
Prédécesseur d’Oskar Schlemmer au Bauhaus. Signe en 1933 une déclaration d’allégeance à Hitler. Ecrit des articles pour Die Kunstkammer, revue culturelle officielle. Classé « artiste dégénéré » en 1937.
Source :
http://www.telerama.fr/sortir/ces-artistes-du-bauhaus-qui-ont-flirte-ou-pire-avec-les-nazis,149646.php
Une maladresse dites vous ? !
Une monstruosité oui, pas seulement,
doublée d’une offense à tous nos morts, à tous ceux qui sont passés dans ces chambres de la mort , qui ont entendu se refermer les portes derrière eux et dont les cris, résonnent encore si douloureusement dans nos cœurs !
Une offense à nos morts et à tout notre peuple !
Contre quoi vous insurgez si vertueusement?
sur l’implication d’une partie des gens du Bauhaus avec les nazis?
sur le contraire?
Sur le fait que l’exposition le mentionne alors qu’elle ne le devrait pas?
Au contraire sur le manque d’explication ?
qu’est ce qui motive votre commentaire?
C est arrogant, et irésponsable de parler d une simple brèche dans le texte.
L’Unesco a classé au patrimoine mondial une partie de l’architecture des années vingt et trente du siècle passé, qui fit de Tel-Aviv cette ville blanche au bord de la Méditerranée. À cette occasion, le Soir écrivait : « Des architectes ayant fui l’Allemagne nazie avaient construit 4.000 immeubles inspirés du Bauhaus. » L’article précisait : « Tout a commencé dans les années 30 peu après l’accession d’Adolf Hitler au pouvoir en Allemagne. Exclus de leur milieu professionnel en raison des nouvelles lois antisémites de 1933 et pressentant la catastrophe qui se préparait en Europe, de nombreux architectes juifs allemands se sont alors installés en Palestine. »
Certes, on ne prête qu’aux riches, et le Bauhaus est depuis longtemps devenu un label qui fait vendre et incarne de façon sommaire un concept qu’il ignorait et aurait combattu avec la dernière énergie, celui de style international. La notion de style, liée à la tradition académique, y était rejetée ; le Bauhaus affirmait la nécessité d’un art moderne, c’est-à-dire en prise directe sur les problèmes sociaux, économiques et politiques de son temps. L’interprétation formaliste actuelle du Bauhaus est largement inspirée de la critique anglo-saxonne ultérieure. Est-ce parce qu’il faudra récolter des centaines de millions d’euros ou de dollars pour restaurer ce patrimoine construit avec des moyens souvent élémentaires, que la publicité donnée à l’événement est à ce point simplificatrice et réductrice ?
Les faits sont bien différents et bien plus complexes. Le Bauhaus ne formera que peu d‘architectes, entre 1927 et 1933, année de sa fermeture volontaire pour ne pas céder aux ukases des nazis. Deux professeurs que tout opposait s’en chargèrent, le Suisse Hannes Meyer, qui partit en Union soviétique en 1930, et l’Allemand Ludwig Mies van der Rohe, qui n’abandonna l’Allemagne nazie pour les États-Unis qu’en 1938, après avoir tenté de nombreux compromis avec le Régime. Certes, dès 1920, le fondateur de l’École, Walter Gropius, avait au Bauhaus son propre bureau d’architecture, auquel il associait à l’occasion quelques étudiants. Et le bâtiment qu’il conçut en 1926 pour le transfert de Weimar à Dessau a fait date dans l’histoire de l’architecture. Quelques Juifs vinrent de « Palestine » étudier au Bauhaus, où ils furent inscrits sous la « nationalité palestinienne » en vigueur sous le mandat britannique. Les architectes véritablement formés au Bauhaus et qui œuvrèrent à Tel-Aviv se comptent sur les doigts de la main. La figure la plus marquante en est Arieh Sharon, l’assistant de Hannes Meyer, qui a retracé sa trajectoire dans son livre : Du Bauhaus au Kibboutz.
Ainsi, les architectes qui importèrent les tendances européennes en « Palestine » vinrent en réalité de bien des pays, principalement de Russie, d’Ukraine, de Pologne, des Pays baltes, parfois après avoir été formés dans différentes écoles d’Europe occidentale. Et l’on y dénombre bien plus de diplômés des Académies belges que du Bauhaus ! Génia Averbuch, à qui l’on doit le Rond-Point Dizengoff, fit ses études à l’Académie de Bruxelles. Au surplus, le Haut-Commissariat britannique joua un rôle dans la planification urbaine, marquée par la personnalité de l’Écossais Patrick Geddes. Une administration autonome fut mise en place en 1923. L’implantation et le gabarit uniforme des immeubles disposés en fonction d’exigences climatiques, assurèrent l’unité d’un ensemble plus divers dans le détail qu’il n’y paraît à première vue. Des architectes importants, comme Richard Kaufmann, l’auteur du Théâtre Habimah, sont à l’œuvre sur place dès 1920, à l’heure où le Bauhaus commence à peine à fonctionner. Et parmi ceux qui s’installèrent plus tard au gré des circonstances, on peut noter des influences nombreuses totalement étrangères au Bauhaus : Le Corbusier, Erich Mendelsohn, l’Art-Déco français, etc. Tout cela ne fait-il pas de Tel-Aviv un terrain d’expérience bien plus riche et passionnant que ne le laisse entendre une propagande un peu sommaire ?
Un paradoxe vaut la peine d’être relevé. L’architecture juive d’Europe, et notamment la construction de synagogues, fut au 19e siècle inspirée d’une image romantique de l’Orient. Les premiers bâtiments construits par des Juifs en « Palestine » prolongèrent cette tradition et s’efforcèrent de maintenir le lien avec l’architecture vernaculaire. L’afflux massif d’architectes européens dans les années 1930 allait marquer la rupture avec cette tendance, tout en conservant une vision d’ensemble inspirée des villes méditerranéennes cubiques et blanches, vision à laquelle le béton armé permettra d’ajouter, avec ses pilotis, ses terrasses et ses porte-à-faux, tout un jeu plastique d’ombres et de lumières.
Tel-Aviv a connu une ascension fulgurante dans les années trente, car la concentration urbaine constituait la seule réponse à l’accélération de l’immigration, pour laquelle l’Agence juive ne disposait pas de terrains suffisants. Cette bourgade de 200 habitants en 1909 en compte 30.000 en 1924, 50.000 en 1930 et en atteindra 170.000 à la veille de Seconde Guerre. Cette croissance rapide a donné au centre de la ville son caractère, dont les qualités urbanistiques et architecturales n’ont commencé à être reconnues dans le pays qu’au milieu des années quatre-vingt du siècle dernier.
Face à ce nouveau défi, de nouveaux commencements se profilent. Mais qui s’écrivent au présent de « l’universel juif », seul paradigme capable de « maintenir encore l’Histoire ouverte, l’homme inaccompli, la création inachevée ». D’où le « scandale » du judaïsme : ré-engendrer continûment la formule, une fois l’événement, fût-il catastrophique, advenu.
© Gilles-Michel De Hann pour « Vision d’Israël » – 2009
Fritz Ertl a est jugé à Vienne au début de 1972 et il a été acquitté. Pourtant quelques années plus tard lorsque les archives du KGB ont été ouverte derrière Himmler ou Eichmann, apparaissent de nouveaux personnages, bien moins connus, et qui jouèrent un rôle décisif: les fonctionnaires de la Direction des constructions SS (Bauleitung SS), mais aussi les ingénieurs et responsables des firmes civiles chargées des travaux. Karl Bischoff, le « Bauleiter ». Ses adjoints directs, Walter Dejaco et Fritz Ertl. Et surtout l’ingénieur principal Kurt Prüfer, qui équipa Auschwitz de crématoires surpuissants, fabriqués par la société qui l’employait, la Topf und Söhne d’Erfurt, totalement associée à l’entreprise criminelle.