Haïm Korsia : « Je me fais un pieux devoir de n’avoir jamais lu Céline »
À LIVRES OUVERTS. Dans le cadre de son rendez-vous littéraire hebdomadaire, « Le Point » a interrogé les goûts du grand rabbin de France.
PROPOS RECUEILLIS PAR LAURELINE DUPONT ET THOMAS MAHLER
Grand rabbin de France depuis 2014, Haïm Korsia n’est pas que l’homme d’un seul livre. Passionné de BD, l’ancien aumônier en chef des armées s’avère aussi être un lecteur vorace – et éclectique – de romans. Dans le cadre du nouveau rendez-vous hebdomadaire À livres ouverts, il a accepté d’ouvrir sa bibliothèque au Point. De Buck Danny au Talmud en passant par Amin Maalouf ou Tom Clancy, Haïm Korsia confie ses coups de cœur. Mais entre les proustolâtres et les céliniens, ce multidiplômé rejette les deux chapelles…
Le Point : Qu’est-ce que pour vous la littérature ?
Haïm Korsia : La littérature est le terreau sur lequel nous construisons notre façon de faire société. Un livre partagé est une espérance partagée. Mais nous pouvons, et nous savons, nous déchirer pour un livre ou un auteur. Nous sommes en France un pays littéraire. Les Lumières sont le moment où le savoir se partageait et circulait grâce aux livres et à la passion de transmettre et de raconter. Le soir de la Pâque juive, lors du repas de fête, nous avons l’obligation de raconter. De lire le livre et de raconter la sortie d’Égypte et c’est comme cela que nous vivons cet instant comme si nous-mêmes avions traversé la mer Rouge. Ainsi, en France, nous étions tous à Gergovie avec Vercingétorix, à Roncevaux avec Roland, à Orléans et Reims avec Jeanne, à Marengo avec Bonaparte, sur l’île du Diable avec Alfred Dreyfus, à Taintrux avec le grand rabbin Bloch, à Dachau avec Michelet, à Auschwitz avec Simone Veil, aux Glières avec Tom Morel, devant le Panthéon autour de Jean Moulin avec Malraux, dans l’espace avec Thomas Pesquet où nous avaient déjà accompagnés Tintin et Jules Verne. La littérature, c’est le bonheur incroyable que vous avez lorsque vous rencontrez quelqu’un qui a lu un livre que vous avez profondément aimé, ou mieux, quelqu’un qui vous remercie de lui avoir offert ou conseillé un livre qu’il a aimé. C’est cette fraternité ponctuelle et si forte qui est belle.
Quel livre lisez-vous en ce moment ?
En dehors des lectures « utilitaires », je suis en train de lire des ouvrages remarquables : Un fauteuil sur la Seine, où Amin Maalouf raconte le 29e fauteuil de l’Académie, Le Flâneur de l’Élysée de Pierre-Louis Basse où joie et mélancolie se frottent. Je viens de finir Tu n’as pas tellement changé de Marc Lambron, sur la perte d’un frère et surtout cet incroyable livre d’Adeline Baldacchino, Celui qui disait non, tellement incroyable que j’en ai commandé de nombreux exemplaires pour le faire lire autour de moi. C’est l’histoire de cet homme qui, seul, ose croiser les bras en 1936 sur le port de Hambourg alors que toute la foule exécute le salut nazi sur une photo célèbre. Elle a été sur place chercher la force qui a été le moteur d’August Landmesser. Et chercher sa force à elle. C’était l’amour. C’est l’amour qui nous pousse à résister, à être nous-mêmes, malgré le prix à payer. Ce texte à la fois historique et romancé, personnel et universel peut être compris comme une parabole à l’usage de tous, et d’abord de ceux qui croient n’en avoir pas l’usage. C’est un hymne à l’espoir malgré la tragédie.
Je finis aussi l’ouvrage très spirituel de Chantal Delsol, Un personnage d’aventure ; petite philosophie de l’enfance, qui nous donne à espérer être toujours, un peu, un enfant. Et puis, en BD, Le Premier Homme tiré du roman de Camus, et Le Photographe de Mauthausen… J’ai toujours deux ou trois livres en cours de lecture.
Quels sont vos genres littéraires de prédilection ?
Tous. Mais je veux citer particulièrement les biographies, y compris celles de personnes peu connues du grand public qui accomplissent, en écrivant leur histoire, le devoir fondateur de transmission, répondant ainsi à l’injonction du Deutéronome « Interroge ton père et il te dira… »(Deut, XXXII, 7).
S’il vous fallait choisir entre le Talmud et votre passion, la BD ?
Je suis, naturellement, lecteur du Talmud et, « en même temps », de BD que je collectionne… Mon rêve serait que le Talmud soit transposé en BD, comme la Bible l’est de longue date, chez Dargaud. Et les classiques le sont de façon remarquable par Luc Ferry. Il ne manque vraiment que le Talmud, puisqu’il y a déjà Le Chat du rabbin !
Votre écrivain fétiche ?
Alexandre Dumas, Victor Hugo, Jules Verne…Mais il y a tant d’auteurs dont il faut tout lire pour comprendre l’œuvre. Je pense à Tom Clancy, Ken Follet, Robert Harris.
Le livre que vous relisez régulièrement ?
La Bible.
J’ai lâché » La Part de l’autre », d’Éric-Emmanuel Schmitt, dès la trentième page, quand je me suis rendu compte qu’Hitler commençait presque à me paraître sympathique.
Quel classique vous est tombé des mains ?
Aucun classique n’est arrivé à me tomber des mains. Mais je dois dire que j’ai lâché La Part de l’autre d’Éric-Emmanuel Schmitt dès la trentième page, quand je me suis rendu compte qu’Hitler commençait presque à me paraître sympathique. J’ai tort, car il écrit si bien, mais un jour…
Le classique que vous avez honte de ne pas avoir lu ?
Il n’y a pas de honte à avoir de n’avoir pas lu telle ou telle œuvre : aucune culture ne peut être universelle, ni absolue. On lit par hasard, par attrait, par amour, pas par obligation. Sauf à l’école, et encore.
Proust ou Céline ?
Ni l’un ni l’autre ! L’un est porteur de passions tristes, d’une langueur des choses dans une certaine France, qui ne correspond pas à la vision que j’ai de mon pays, même s’il a le talent de l’écriture… et des phrases trop longues. L’autre est porteur de haine, et a été condamné à l’indignité nationale, ne l’oublions pas. Cela a du sens pour moi, et je me fais un pieux devoir de ne l’avoir jamais lu. Pas une ligne. La polémique récente n’aurait jamais dû exister, car personne n’aurait dû poser encore la question. Je trouve honteux de voir désigner ces horreurs comme des « pamphlets » ou pire encore, comme des « écrits polémiques ». Il s’agit de textes violemment antisémites et nauséabonds. Je me réjouis de la réponse finale apportée par Gallimard.
Votre personnage de roman favori quand vous étiez enfant ?
Il y en a eu plusieurs. Je pourrais citer Bob Morane, d’Henri Verne, Aramis, ce compagnon fidèle et taiseux du flamboyant d’Artagnan, déjà un religieux. Puis plus tard, Jack Ryan de Tom Clancy.
De quel personnage êtes-vous tombé amoureux ?
De Joseph, fils de Jacob, qui reste fidèle à sa foi et sauve son pays, l’Égypte, et de Buck Danny, l’aviateur. Une vocation, l’aviation et l’armée de l’air.
Quelles sont vos habitudes de lecture ?
Je lis tout le temps, partout, dès que je peux, dans le train, l’avion, la nuit et le jour. La lecture est ma respiration, ma façon de ne pas être enfermé dans les réalités objectives de la vie. On a cru inventer la réalité augmentée, mais en vérité, elle existait déjà, c’est la littérature. Seuls les malheureux qui n’ont pas la lecture en partage voient dans la réalité augmentée une innovation.
Quelle est la dernière chose importante que vous ayez apprise dans un livre ?
Amin Maalouf cite, page 55 d’Un fauteuil sur la Seine le livret de Philippe Quinault pour l’opéra Atys : « Il faut souvent pour devenir heureux ; Qu’il en coûte un peu d’innocence. » Cette phrase m’a marqué. Elle est juste, car, en effet, on doit toujours sacrifier une part d’innocence pour accomplir son devoir. J’ai vu cela avec nos soldats qui s’engagent partout dans le monde et qui perdent une large part de leur innocence afin que nous puissions conserver la nôtre. Comme le roi David à qui l’Éternel interdit de bâtir le Temple, car ses mains sont rouges de sang, même s’il a combattu sur l’ordre divin.
Que comptez-vous lire prochainement ?
Je n’ai pas encore lu le dernier Goncourt. Je veux relire aussi Baldacchino, et Le Poids de la grâce de Joseph Roth, revenir sur Le Très-Bas de Christian Bobin et Seul dans Berlin de Hans Fallada, qui sont des livres très forts. Je dois avoir une bonne trentaine de livres sur mon étagère : à lire d’urgence.
Faut-il vraiment lire les textes religieux ?
Bien sûr, cette lecture est indispensable ; elle nous replace dans l’intemporalité des choses. Un grand général français de mes connaissances a coutume de dire que pour être certain d’avancer, il faut se laisser pénétrer par l’immuable. Or les textes religieux portent l’immuable de l’humain : des frères qui se combattent, des familles déchirées, des hommes dressés les uns contre les autres, mais aussi des frères qui se réconcilient, des familles qui se retrouvent, des hommes qui fraternisent, car, comme le dit le psaume 133,1 : « qu’il est bon, qu’il est délicieux que des frères habitent ensemble ». Ce simple verset des psaumes porte l’espérance universelle de l’humanité. Hier comme aujourd’hui, ici comme à l’autre bout du monde.
Source :
http://www.lepoint.fr/livres/haim-korsia-je-me-fais-un-pieux-devoir-de-n-avoir-jamais-lu-celine-21-01-2018-2188410_37.php
qui peut réellement lire Céline plus de quelques minutes, il faut essayer pour voir , en plus lui Céline ne voulait pas de son vivant que ces livres soient publié, ni vu ni connu , c’était pas moi, et puis il pourrait dire , à l’époque c’était à l’époque les journaux titraient facilement le journal le plus antisémite comme la CROIX , un avait chois comme nom l’antisémite. Quelque par publier ces livres c’est décrire quelle était l’état d’esprit avant et pendant la deuxième guerre mondiale, je suis étonnée que plusieurs articles de Valeurs Actuelles, condamnent le retrait « d’un des plus grands éditeur français » , quoi d’un seul coup pas de mal à reconnaître que se dire antisémite sur tous les tons était la norme à l’époque de céline.
l’absinthe antijuive
https://www.syllepse.net/syllepse_images/absinthe.jpg
« Montbéliard – Doubs »
tiens donc, voilà un indice supplémentaire qui vient corroborer mon sentiment sur cette région que je dois quitter suite à un cumul d’évènements vécus …
« absinthe anti-juive »
comble de la dérision, le produit est classé comme ‘spiritueux’
https://fr.wikipedia.org/wiki/Absinthe_(spiritueux)
vu le changement démographique – volontaire – que je constate en seulement quelques années de présence, c’est pas moi qui les plaindrait du retour de bâton, à force de semer on finit par récolter :
http://www.estrepublicain.fr/actualite/2012/03/22/l-entrainement-commando-des-islamistes-du-doubs
http://www.macommune.info/article/peines-allegees-pour-les-islamistes-du-doubs
Peu de gens savent que Céline soutenait discrètement les premiers négationistes, après la guerre. Ce qui prouve que son refus de rééditer ses pamphlets n’avait comme seul motif, que de ne pas nuire à son aura de grand écrivain, pas de renier son antisémitisme délirant ! Quant à son style très particulier, qui fait entrer le langage « parlé brut » dans la littérature, personnellement, je n’aime pas du tout… C’est pourquoi je n’ai lu que quelques lignes de ses oeuvres « présentables », vite rangées sur une poussiéreuse étagère de mon grenier !
même chose
Bof propos plus que discutables…Ne pas lire Celine au titre que lhomme etait il.est vrai une ordure est une erreur a mon sens.
D’abord parce que voyage au bout de la nuit reste un tres grand livre. Et surtout parce que.si on choisit lhomme plutot que less oeuvres ily.a rapidement dilemmme.En effet Mr Korsia aime.lire Jules Verne malheureusement Jules vernes etait.antisemite …que faire alors?Passer a cote des romans de ce grand écrivain?
Je ne me souviens pas qu’un seul bouquin de Jules Vernes, soit ouvertement antisémite (même si l’homme privé l’était), et encore moins qu’il appellelait au meurtre ! Voyage au bout de la nuit est certainement un grand livre, mais je ne suis pas allée au delà de la 20 ème page : le style de l’ouvrage n’étant pas ma tasse de thé !
Le seul livre de Céline que J’ai lu, il y a très longtemps, c’était » d’un château à l’autre »
Ce livre est un témoignage sur la vie des collabos réfugiés à Sigmaringen.
Il est historiquement bien plus intéressant que les pamphlets.
Moi qui aime les livres, je suis incapable de dire ce que j’ai fait de ce bouquin.
Introuvable dans ma bibliothèque, même là où il faut un escabeau…