Des agents du Mossad auraient acheté des informations sur la Russie à une entreprise italienne impliquée dans un scandale d’espionnage

Le scandale des pirates informatiques secoue la politique et l’opinion publique italiennes depuis plusieurs jours.
Par ROSSELLA TERCATIN
Des agents israéliens, prétendument du Mossad , ont cherché à acheter des informations à une entreprise privée italienne qui espionne illégalement depuis des années la vie des hommes politiques, des fonctionnaires et des personnalités du monde sportif et des médias, selon des documents de la police italienne cités par les médias mardi.
Le scandale des pirates informatiques secoue la politique et l’opinion publique italiennes depuis plusieurs jours, depuis que les procureurs locaux ont dévoilé les opérations illicites et arrêté plusieurs personnes au cours du week-end, dont l’expert en informatique Nunzio Samuele Calamucci, 44 ans. La police et les procureurs ont produit des milliers de pages documentant des appels téléphoniques, des réunions et des preuves recueillies dans les bureaux d’Equalize, une entreprise basée à Milan.Calamucci et ses complices, parmi lesquels figuraient plusieurs membres ou anciens membres des forces de police italiennes, ont réussi à pirater des téléphones et des appareils individuels et à accéder aux bases de données policières et institutionnelles. Leurs tarifs allaient de 250 euros pour pirater un téléphone personnel à des dizaines de milliers d’euros pour un dossier sur un individu précis.
Parmi les cibles des opérations d’Equalize (parfois en coopération avec d’autres sociétés spécialisées dans les services de sécurité) figuraient le président italien Sergio Mattarella, le président du Sénat italien Ignazio La Russa, l’éminent dirigeant politique Matteo Renzi, le chanteur Alex Britti et le champion olympique du 100 mètres de 2020 Marcell Jacobs. La police a découvert 800 000 dossiers dans le coffre de l’entreprise.
Des entrepreneurs, des entreprises et des personnalités publiques ont fait appel aux services de l’entreprise.
Le 8 février 2023, deux agents israéliens non identifiés se sont rendus au bureau d’Equalize et ont été photographiés par les Carabinieri, qui surveillaient l’entreprise, a rapporté mardi le Corriere della Sera.La veille, Calamucci avait eu une conversation au sujet d’une prochaine réunion avec un partenaire, sans savoir que la police avait déjà mis son téléphone sur écoute.« Ils m’ont proposé un travail d’un million d’euros », a déclaré Calamucci.Selon le rapport de la police italienne, les agents israéliens ont demandé à l’entreprise de fournir des informations sur la milice russe Wagner Group , notamment sur son financement et ses activités financières en Europe. Ils ont également discuté d’informations sur les cyberattaques russes, menées par des pirates informatiques proches des autorités russes, et sur le financement des intérêts russes sur le Vieux Continent.Calamucci a souligné que les Israéliens agissaient non seulement en leur nom, mais aussi au nom d’autres agences de renseignement. Au cours de l’appel téléphonique, le pirate italien a mentionné le Vatican.

« Ils utilisent la moitié des données pour combattre Wagner, tandis qu’ils donnent l’autre moitié au Vatican », a-t-il déclaré.Vincenzo (Enzo) De Marzio, ancien carabinier, aurait facilité le premier contact entre les Israéliens et les pirates informatiques italiens. Dans une conversation téléphonique enregistrée, il a expliqué à Calamucci qu’il avait fait leur connaissance alors qu’il était en poste à l’ambassade d’Italie à Tel-Aviv. « Ils nous ont donné 40 000 dollars jusqu’à présent, par l’intermédiaire d’Enzo », a déclaré Calamucci, selon la police italienne.Les enquêteurs italiens ont écrit dans leur rapport que De Marzio « a fourni au groupe des contacts, des renseignements étrangers et des clients de très haut niveau ».Selon les documents de la police, qui comptent des milliers de pages, les agents israéliens auraient également proposé à la firme italienne de partager des informations sur le trafic illicite de gaz iranien en Italie. Ces informations pourraient intéresser un autre client d’Equalize, le géant énergétique italien ENI, qui a nié dans un communiqué avoir eu connaissance d’une quelconque activité illégale de la firme.
Les dirigeants politiques italiens expriment leurs inquiétudes
Plusieurs dirigeants politiques italiens ont exprimé leurs inquiétudes alors que de plus amples détails sur le réseau d’espionnage apparaissent de jour en jour.
« Intrusion dans la vie privée des gens et utilisation des informations à des fins financières ou politiques est une véritable menace pour la démocratie », a déclaré le ministre italien des Affaires étrangères Antonio Tajani. « Nous ne pouvons pas exclure que ces informations soient utilisées par nos ennemis géopolitiques, comme la Russie ou d’autres pays. »« Je suis amer et blessé pour moi et ma famille », a déclaré Renzi dans une interview à Politico. « Ce n’est pas la première fois qu’une telle chose m’arrive. Mais en tant qu’Italien, je suis en colère parce que c’est une menace pour la démocratie et la vie privée. »
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