A LIRE : »Les musulmans et la machine de guerre nazie » de David Motadel
Préface de Christian Ingrao. Traduit de l’anglais par Marie Hermann et Charlotte Nordmann. La Découverte, 2019, 440 pages, 25 €.
David Motadel, professeur d’histoire internationale à la London School of Economics, ouvre un chapitre oublié du second conflit mondial : les relations entre l’Allemagne nazie et le monde musulman, qui ne peuvent se résumer à l’enthousiasme du grand mufti de Jérusalem pour le régime hitlérien, connu à cause de son incidence sur le conflit israélo-arabe. Dans le jeu des alliances, l’Allemagne avait tout intérêt à courtiser les populations musulmanes, soumises soit à la colonisation française ou anglaise, soit à l’athéisme soviétique, ou bien, à partir de 1942, à l’invasion de l’Afrique du Nord par les Américains. Comme l’affirma Heinrich Himmler, grand admirateur de l’islam : « Depuis deux cents ans, l’Allemagne n’a jamais eu le moindre différend avec l’islam. » Il fallait convaincre les musulmans qu’ils partageaient les mêmes ennemis et que, derrière ces ennemis, se trouvait la main des Juifs, en cherchant à les entraîner dans l’obsession antisémite. Dans le Caucase, en Bosnie, en Tunisie ou en Lybie, mais aussi en Pologne, en Lituanie ou en France, le contact avec les populations musulmanes fut de natures différentes selon les territoires. Tant sur des exemples – comme celui de l’engagement fervent au côté des nazis des Tatars, qui voyaient en Hitler un libérateur des bolchéviques – que sur les relations avec les dignitaires religieux ou les outils de la propagande écrite et radiophonique, Motadel démontre, grâce à un remarquable travail de recherche, la complexité de la rencontre entre ces deux univers et ses conséquences après-guerre. Une lecture passionnante.
Professeur d’histoire internationale à la London School of Economics and Political Science, David Motadel s’est penché sur un aspect méconnu de la Seconde Guerre mondiale en s’intéressant à la participation des musulmans à la machine de guerre nazie.
2De fait, à partir de 1941-1942, les forces allemandes combattent en URSS, occupent la Yougoslavie et sont présentes en Tunisie et en Libye où Rommel et son Afrika Korps cherchent à s’emparer de l’Égypte. Sur tous ces théâtres d’opérations, les Allemands sont en contact avec des populations musulmanes. Dès lors, les autorités nazies poursuivent trois objectifs : s’assurer de la loyauté des musulmans dans les zones contrôlées par la Wehrmacht, provoquer des troubles à l’arrière des lignes des Alliés et recruter de nouveaux soldats afin de combler les pertes de plus en plus importantes.
• 1 Max von Oppenheim (1860-1946) a servi comme diplomate à l’ambassade du Caire. Il a mené et financé (…)
3David Motadel montre dans la première partie de son ouvrage que la politique musulmane pensée à Berlin s’inscrit dans une forme de continuité avec l’Allemagne impériale de Guillaume II. L’auteur évoque le discours du Kaiser devant le tombeau de Saladin à Damas en 1898 et les efforts de l’Allemagne pour mobiliser les musulmans à la suite de l’appel au djihad lancé par leurs alliés ottomans le 11 novembre 1914. Il présente aussi les principales figures intellectuelles des études musulmanes, comme le célèbre archéologue Max von Oppenheim1, le diplomate Werner Otto von Hentig et Gerhard von Mende, professeur à l’université de Berlin puis de Hambourg et auteur d’une thèse sur les minorités musulmanes en Union soviétique.
4David Motadel explique comment, à partir de l’été 1941, les représentants du ministère des Affaires étrangères allemands mettent en œuvre une politique systématique d’utilisation de l’islam en vue de mobiliser les musulmans au service de l’effort de guerre nazi. C’est le « moment musulman de Berlin ». Deux personnalités musulmanes se détachent : il y a d’abord Amin Al-Husseini, le grand mufti de Jérusalem nommé par les Britanniques, qui s’était enfui à Téhéran après l’échec de la tentative de coup d’état en Irak mené par les partisans de l’Axe. Exfiltré vers l’Allemagne le 6 novembre 1941, Al-Husseini rencontre Hitler le 28 novembre 1941 (p. 50). Rétribué par les Allemands qui surestiment son influence, Al-Husseini était utilisé pour alimenter la propagande en direction du monde arabe et musulman. On peut aussi citer l’imam Alimjan Idris, qui avait été employé dans les camps de prisonniers musulmans au cours de la Première Guerre mondiale avant d’être recruté comme propagandiste par le ministère des Affaires étrangères.
5La seconde partie du livre de David Motadel s’intéresse aux musulmans dans les zones de guerre. L’auteur traite de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient au chapitre 3, du front de l’Est au chapitre 4 et des Balkans au chapitre 5. Les Allemands s’intéressent dans un premier temps aux prisonniers de guerre musulmans qu’ils détiennent après la campagne de France. Il s’agit, en les traitant avec égards, de « créer une image positive de l’Allemagne, que les soldats répandraient une fois rentrés dans leur pays d’origine » (p. 90). Une bonne partie de ces prisonniers sont d’ailleurs libérés à partir de 1941 quand les Allemands s’engagent en Afrique aux côtés des Italiens.
6Des milliers de tracts conçus à Berlin sont distribués en Afrique du Nord ; Radio-Berlin diffuse des émissions qui mêlent citations du Coran et appels à soutenir les Allemands contre l’impérialisme britannique, le judaïsme et le bolchevisme. Au final, les résultats sont minces : la propagande allemande peine à toucher une population parfois illettrée, qui ne possède souvent pas de postes de radio ; les émissions allemandes sont brouillées par les Alliés qui développent également leur propre communication à destination des musulmans. Surtout, les auditeurs ne sont pas dupes du caractère opportuniste de la propagande allemande en direction des musulmans. La plupart des chefs religieux se tiennent tranquilles, à l’exception des Frères musulmans d’Égypte, surveillés de près par les Anglais.
7Sur le front de l’Est, l’offensive allemande de l’été 1942 débouche sur l’occupation du Caucase du Nord par la Wehrmacht. Des consignes sont adressées aux soldats afin de respecter les coutumes des populations locales. Les Allemands font rouvrir les mosquées et autorisent les fêtes religieuses, occasions de célébrer l’amitié allemande et d’inciter les musulmans à rejoindre les unités d’auxiliaires de la Wehrmacht (p. 148-154). L’expérience tourne court du fait de la contre-offensive soviétique et du repli allemand dès le mois de décembre 1942. C’est principalement en Crimée, entre juillet 1942 et mai 1944, que les nazis ont pu mettre en place une politique de rapprochement avec les musulmans. Les 250 000 Tatars de Crimée représentaient environ un quart de la population de la péninsule. Comme dans le Caucase, les mosquées et les madrasas sont rouvertes, les fêtes religieuses autorisées, l’éducation religieuse introduite dans le programme des écoles élémentaires. Les Allemands s’appuient sur des comités musulmans chapeautés par un comité central installé à Simferopol qui édite un journal pro-allemand, Azat Kirim (La Crimée libre). Les dissensions entre la Wehrmacht et la SS empêchent la nomination d’un mufti de Crimée alors que, dans l’Ostland administrée par Alfred Rosenberg, un certain Jakub Szynkiewicz, ancien mufti de Pologne durant l’entre-deux-guerres, est nommé mufti de Lituanie. Au final, les efforts des Allemands pour se concilier la population musulmane de Crimée et recruter des auxiliaires butent sur les réalités de la guerre et son extrême violence. Des milliers de Juifs et de Tziganes sont assassinés, des villages entiers sont détruits par les bombardements de la Luftwaffe.
8Dans les Balkans, les autorités allemandes s’efforcent de se concilier les musulmans de Bosnie. Fin mars et début avril 1943, le grand mufti Al-Husseini est envoyé en tournée dans les territoires musulmans de la grande Croatie, malgré les réticences du régime d’Ante Pavelic. Pour les nazis, la Bosnie devait servir d’exemple propre à convaincre tous les musulmans de rallier le camp de l’Axe. Les Allemands s’appuyaient sur un certain nombre de collaborateurs au sein du conseil des oulémas de Bosnie, dont Mohammed Pandža, chargé de recruter des volontaires pour la SS. Sur le terrain, les Allemands étaient cependant confrontés aux attaques des partisans de Tito et des Tchetniks, et incapables d’assurer la protection des villages musulmans.
9La troisième partie du livre de David Motadel s’intéresse aux musulmans dans l’armée allemande. Près de 300 000 musulmans ont combattu dans les « légions de l’Est ». En 1943, sur 79 bataillons, 54 étaient musulmans ou à majorité musulmane, la formation de ces unités étant assurée par la 162e division d’infanterie turkestane (p. 227).
10Dans les Balkans, Himmler recrute des musulmans dans la 13e division de montagne de la Waffen SS, rebaptisée Handžar. 20 000 personnes s’y engagent. La division est envoyée s’entraîner dans le Sud de la France en 1943 avant de repartir pour les Balkans affronter les partisans. Des imams militaires sont institués pour galvaniser les combattants ; une école de formation pour mollahs, dépendant de la Wehrmacht, est créée à Göttingen tandis que des instituts pour former les imams et les mollahs militaires de la SS sont fondés à Guben et à Dresde. Al-Husseini, Idris et Szynkiewicz s’y rendent et coordonnent les formations. Idris prêche notamment contre le sectarisme religieux et la fracture sunnites/chiites et appelle à l’unité des musulmans contre le judéo-bolchevisme. Des revues de propagande à destination des troupes musulmanes du front de l’Est sont éditées et distribuées aux soldats des Ostlegionen.
11À la fin de la guerre, la répression est terrible pour les populations musulmanes qui ont soutenu les Allemands – Tatars de Crimée, Tchétchènes… – : elles sont déportées. Al-Husseini est libéré et retourne en Palestine. Avec l’installation de la guerre froide, les vétérans musulmans du front de l’Est deviennent un enjeu pour les services de renseignement allemands et américains qui veulent les utiliser à des tâches de propagande contre l’URSS. Au début des années 1960, les Frères musulmans de Saïd Ramadan, soutenus par la CIA, prennent la tête de la communauté musulmane de Munich. Au fond, l’utilisation du panislamisme par les États-Unis en Afghanistan au début des années 1980 s’inscrit dans une remarquable continuité avec la politique mise en œuvre par l’Allemagne durant la Seconde Guerre mondiale.
12Le livre de David Motadel montre pourtant l’échec relatif des tentatives allemandes qui reposaient sur le postulat erroné de l’existence d’un panislamisme transcendant les identités et les revendications nationales que les Allemands, engagés dans la conquête d’un espace vital à l’Est, n’avaient aucune intention de satisfaire. Pas dupes du caractère opportuniste des promesses d’amitié et de respect à l’égard des musulmans formulées par les Allemands, les populations musulmanes des zones de guerre ont pu espérer recouvrer leur liberté religieuse ou une certaine forme d’autonomie, mais leurs espoirs ont achoppé sur la réalité d’une guerre d’anéantissement à la violence inédite.
13En replaçant la politique nazie à l’égard des musulmans dans son contexte et en en dégageant les continuités, de la Welpolitik de Guillaume II aux talibans afghans, David Motadel dépasse l’objet initial de son ouvrage et fait réfléchir le lecteur. Comme le souligne Christian Ingrao à la fin de sa préface, « c’est là la marque des grands livres d’histoire ».
Source
https://journals.openedition.org/lectures/36034
Et l’ on continue le nazisme ; en faisant passer les soit disant palestiniens pour des victimes du Sionisme ; ce faux peuple qu’il soit renvoyé d’ou il vient c’est a dire que chacun retourne dans sont pays d’origine ; et l’ europe les soutient et les finance avec nos taxes les criminels Arafat ,Abbas ce sont fait des fortunes et massacrent leurs opposants et personne ne dit rien . Et l’on paye les criminels qui assassinent les Juifs ;
NAZISLAMIQUES LES PREUVES DE L’ALLIANCE CRIMINELLE DANS LE CRIME DE MASSE
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c’est l’ancêtre de ryssen au centre de l’image ?