Le discours moral de l’Eglise peut-il fonctionner face à l’islamisme ?

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FIGAROVOX/ANALYSE – Après les attentats, la volonté de l’Eglise de «pacification sociale» est inquiétante, juge Schmuel Trigano. Pour le philosophe, ce positionnement laisse une marge de manoeuvre à l’islamisme, notamment aux Frères musulmans.
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Professeur émérite des Universités, Shmuel Trigano est un philosophe et sociologue, spécialiste de la tradition hébraïque et du judaïsme contemporain.

La réaction de l’Eglise de France comme du Vatican à l’assassinat pour motif religieux du prêtre de Saint-Etienne-du-Rouvray est étonnante et pour tout dire extrêmement inquiétante, en tout cas du point de vue d’un observateur juif, autant sur le plan théologico-politique que sur celui de l’Etat et de la citoyenneté républicaine. Certes, la réaction officielle et celles que nous donnent à voir (sélectivement, comme on s’en doute) les médias ne recouvrent pas tout ce que pensent les catholiques et on ne peut pas préjuger de l’énorme pression que le pouvoir socialiste a dû exercer sur ses représentants pour adopter ce que l’on peut définir comme la posture du martyr et non celle du citoyen.
Sublimer ce meurtre, en sortir par le «haut» – cette posture vertueuse et pleine de hauteur morale, stoïcienne en un mot – fournit, effectivement, à (très) court terme, le moyen d’éviter une cassure et un clash dans la société française. L’assistance en signe de solidarité de quelques musulmans (et Juifs) à la messe dominicale, a été construite par les médias comme l’expression d’une concorde irénique. Cependant, si on pensait dans les termes de René Girard on constaterait qu’elle s’est nourrie du «sacrifice» du père Hamel, un sacrifice au propre, par la mort rituelle qui lui a été donnée, et au figuré: mort pour la «paix». Sur sa mort, sur sa dépouille, le lien social se serait ressoudé. C’est ce que les médias veulent nous faire croire, selon un schéma anthropologique on ne peut plus classique.
Cet état de fait est marqué néanmoins par un télescopage de la morale chrétienne et de la raison politique. Appliquée à la situation actuelle, cette morale s’avère effectivement problématique sur le plan de la Cité. J’ai entendu un ecclésiastique aborder l’événement sur le mode du «nous sommes tous coupables» (explicitement formulé de la sorte) et appris qu’une prière avait été dite, dans l’Eglise même du drame, pour les deux assassins. Nous avons entendu le pape déclarer que ce n’était pas cela l’islam (étrange qu’il puisse parler en son nom) et que le christianisme était aussi violent que l’islam, en disant donc une chose et son contraire). Qui est coupable? Qui est innocent? On ne le sait plus.
Nous retrouvons, certes, là le discours du «politiquement correct» qui déresponsabilise le monde musulman au lieu de le pousser à se confronter à la maladie qui le ravage et met en danger la paix, un discours qui brise aussi la capacité morale et intellectuelle à la combattre, en accusant les victimes d’être à la source de la violence qui les frappent.
Nous croyions que cette «morale» sans réciprocité relevait de l’idéologie dominante de notre temps, le post-modernisme, mais nous découvrons qu’elle peut aussi se développer dans l’Eglise. Cet état de fait rappelle irrésistiblement les observations que Jean-Jacques Rousseau développe à propos de la religion catholique sous le jour de son projet de fondation de la démocratie: «loin d’attacher les cœurs des citoyens à l’Etat, elle les en détache comme de toutes les choses de la terre». «Tout cela s’accorde mal avec la douceur du chrétien, et après tout qu’importe qu’il soit libre ou serf dans cette vallée de misères? L’essentiel est d’aller en paradis et la résignation n’est qu’un moyen de plus pour cela. Survient-il quelque guerre étrangère?… Ils font leur devoir mais sans passion pour la victoire. Qu’ils soient vainqueurs ou vaincus qu’importe? La Providence ne sait-elle pas mieux ce qu’il leur faut? Qu’on imagine quel parti un ennemi, fier, impétueux, peut tirer de leur stoïcisme».
On comprend que le signal qu’envoie l’Eglise puisse trouver un écho favorable dans les milieux islamistes et je pense avant tout aux Frères Musulmans qui en sont la vitrine distinguée et «politique», interlocuteur du Pouvoir en France. Un écho dont nous pouvons mesurer la portée dans la tribune publiée par des «intellectuels musulmans», ainsi définis par eux-mêmes, dans le Journal du Dimanche du 3/7/2016. Je me réfère au fait que cette quarantaine de personnalités a tout simplement «oublié» les victimes juives dans les actes terroristes commis au nom de l’islam, qu’elles condamnent par ailleurs. C’est comme si la «pacification» consécutive au meurtre du père Hamel se faisait sur la base du refoulement des effets de la haine principale des islamistes: les Juifs. C’est gros! Et c’est encore plus affligeant de voir les critiques de cet oubli ne mentionner que le massacre de Merah et de l’Hyper casher, en «oubliant» eux aussi, les centaines d’agressions antisémites commises depuis 2001, et sur lesquelles eux-mêmes avaient gardé le silence. Depuis 2001, en tout cas, nous n’avons entendu aucune condamnation claire et institutionnelle des agressions antisémites commises, si ce n’est celle de quelques individus (comme l’imam Chalgoumi ou l’Algérien Boualem Sansal).
La condamnation quand elle existe «équilibre» souvent la reconnaissance du caractère antisémite des actes avec l’accusation d’Israël, rendu responsable de cet état de fait, argument dont s’est prévalu en somme Mérah, vengeant (dixit) «les enfants de Gaza». C’est comme si la condamnation des actes antisémites ne pouvait se faire qu’au prix du «dédouanement» que permet un antisionisme de rigueur. Or, cette tournure rhétorique devient de moins en moins possible, au regard de ce que révèle la réalité. La façon dont les signataires de la lettre en question tentent de rendre compte de leur silence abyssal jusqu’à ce jour est ainsi plutôt spécieuse. «Nous musulmans étions silencieux parce que nous avions appris qu’en France la religion est une affaire privée». On se demande s’il faut rire ou pleurer. Agresser des concitoyens relèverait de la sphère privée? La Burka dans l’espace publique, une affaire privée? L’antisémitisme n’est pas un aspect marginal de la crise actuelle. Il en fut le vecteur originel et structurel.
L’abnégation de l’Eglise fait miroiter la possibilité d’une «pacification» sociale, mais c’est aux dépens d’un tiers et de la confrontation avec le problème central auquel doit faire face l’Etat – et lui seul, certainement.
Source :
http://www.lefigaro.fr/vox/societe/2016/08/10/31003-20160810ARTFIG00132-le-discours-moral-de-l-eglise-peut-il-fonctionner-face-a-l-islamisme.php

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4 Commentaires

  1. pierre un Gaulois dit :

    Un point de détail à méditer :
    La mosquée de Saint Etienne du Rouvray a été construite sur un terrain offert par l’Eglise catholique…

    Autre « anomalie » : le Pape ramène des « migrants  » musulmans, alors que les Chrétiens d’Orient ( et les Azéris ) sont persécutés, massacrés ou réduit en esclavage.

    Rappel historique :
    Il y a très longtemps, au Moyen Age, l’Eglise protégeait ses ouailles contre les razzias d’esclaves des pirates musulmans.
    Un ordre monastique a été crée pour racheter les chrétiens captifs.
    l’Ordre de la Merci, fondé par saint Pierre Nolasque, natif de Montpellier.
    Les églises construites au bord de la Méditerranée étaient conçues pour protéger les populations.
    Exemples :
    Les Saintes Maries de La Mer, la cathédrale de Maguelone , L’église de Vic la Gardiole, la cathédrale d’Agde sont des églises romanes fortifiées.

    Ce temps est révolu, rien à attendre de l’Eglise.

  2. franccomtois dit :

    Je suis un malgré moi chez les kto et trés sincerement je vomis sur cette branche du christianisme.Je me suis rapproché de l´église évangélique pour leur ouverture d´esprit notament envers la communauté Juive en tout cas lá oú nous vivons en Allemagne.Attention,parmi les kto il y a comme de partout des gens honnete,donc pas tout le monde dans le meme sac.Mais cette hiérarchie kto,je ne peux plus les voir.L´Islam,impossible pour moi de ressentir quoique ce soit de bon pour cette horreur et je crois que beaucoup de personne nait de cette Religion s´en éloigne et tant mieux.Pas de pardon pour les actes de barbarie et nous devons nous montrer aussi intraitable qu´Israel envers les terroristes.

  3. Lys26 dit :

    Quoi, quoi, quoi!! Elle craque complètement l’Eglise là!!! C’est à « mourir » de rire d’être à ce point à coté de la plaque! Y’en a vraiment qui sont far far-ouest!

  4. mac cabe dit :

    L’Église catholique n’est plus que l’ombre d’elle même !

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