L’Autriche, premier pays européen à interdire les Frères musulmans
Par Atmane Tazaghart
Avec sa nouvelle loi antiterroriste adoptée le 8 juillet au Parlement, l’Autriche devient le premier pays européen à interdire la confrérie islamiste fondée il y a près d’un siècle par l’Égyptien Hassan al-Banna.
Rien ne va plus pour les réseaux islamistes en Autriche. La confrérie des Frères Musulmans était déjà dans le collimateur du gouvernement écolo-conservateur depuis l’attentat de Vienne qui a fait quatre morts et 23 blessés, le 2 novembre 2020. Elle vient désormais d’être inscrite en fin de semaine dernière, le 8 juillet dernier, sur la liste noire des organisations liées à la « criminalité à motivation religieuse ». Ses slogans et sa littérature sont frappés d’interdiction. Leur détention ou propagation est désormais passible de 4 000 euros d’amende et un mois de prison.
Vienne a aussitôt été accusée sur les sites dédiés aux Frères musulmans et à l’organisation turque des Millî Görüs d’« alimenter l’islamophobie » et de « multiplier les attaques contre les musulmans ». Pourtant, l’Autriche reste le seul pays d’Europe à accorder un statut officiel à l’islam. En outre, le pays a longtemps été l’un des principaux fiefs des Frères musulmans et l’une des plaques tournantes financières de l’islamisme politique sur le Vieux Continent.
Les disciples de Hassan al-Banna, le fondateur égyptien de la confrérie, ont implanté leurs premiers réseaux européens, au milieu des années 1960, à Graz, capitale de la province de Styrie, au sud-ouest de Vienne. Youssef Nada, le financier occulte de l’organisation, y a créé en 1969, les premières usines de production de fromages et de produits laitiers de son empire industriel fondé avec le « trésor de guerre » de la confrérie. Avant de migrer vers la Suisse voisine pour y ouvrir la banque al-Taqwa.
Installée dans l’enclave italienne de Campione, en plein cœur du canton suisse du Tessin, cette banque islamique avait été épinglée par les enquêteurs américains au lendemain des attaques du 11 septembre 2001. Accusée de financer le terrorisme, elle s’était empressée de se mettre en faillite. Ce qui a permis au « trésor de guerre » des Frères musulmans de s’envoler vers de nouvelles places financières.
Ainsi le Royaume-Uni, qui accueille alors le commandement de l’Organisation internationale [Tanzim al-dawli], l’instance occulte qui fédère tous les mouvements liés aux Frères musulmans à travers le monde, s’est-il imposé comme leur nouveau fief financier islamiste en Europe.
Lorsqu’en février 2017, Donald Trump menace d’inscrire les Frères musulmans sur la liste des groupes terroristes, les branches européennes réunies à Istanbul, dont l’ex-UOIF [Union des organisations islamiques en France], la filiale tricolore des Frères, annoncent solennellement leur « retrait » de l’Organisation internationale, dont l’existence même était niée jusque-là par les Frères musulmans.
Pour parer à d’éventuels gels américains et sauver au plus vite le « trésor de guerre » installé au Royaume-Uni, le choix se porte sur l’Autriche et plus particulièrement Graz où les Frères disposent de solides relais politiques et associatifs.
Mais les mouvements de fonds qui déferlent sur la ville ne tardent pas à éveiller les soupçons des enquêteurs autrichiens, point de départ d’un long bras de fer juridique qui a abouti à l’interdiction pure et simple de la confrérie. Sur ordre du procureur général de Graz et du Bureau de protection de la Constitution de la Styrie, une vaste enquête est lancée. Nom de code : « opération Luxor ». Elle durera près de deux ans et s’étendra à quatre provinces autrichiennes : la Styrie, Vienne, la Carinthie et la Basse-Autriche. Une soixantaine d’entités telles que des associations, des mosquées, des clubs socio-culturels ou des commerces sont visées.
Au bout de 21 000 heures d’écoutes et à l’aide de 1,2 million d’images de filature, le procureur décide de clore l’enquête et dresse une liste de 70 personnalités soupçonnées de « liens avec une organisation terroriste, financement du terrorisme et blanchiment d’argent ». Une grande rafle est décidée. Elle devait avoir lieu au matin du 3 novembre 2020. La veille, Vienne est frappée par attentat djihadiste.
L’information sur cette rafle fuite dans la presse. L’opinion voit aussitôt dans cette corrélation un lien de cause à effet. D’autant plus que le procureur général de Graz a révélé que son enquête avait permis de geler plus de 20 millions d’euros d’argent sale. Et qu’une liste noire de personnalités opposées à l’islam politique circulait chez les Frères.
Tant et si bien qu’au lendemain de l’attentat, le ministre de l’Intérieur, Karl Nehammer, promet de s’attaquer « aux racines de l’islam politique ». Dans la foulée, la ministre de l’Intégration, l’écologiste Susanne Raab, annonce la création d’un « Centre de documentation sur l’islam politique » chargé de surveiller de près la mouvance des Frères. Une nouvelle loi antiterroriste est déposée devant le Parlement fédéral, le 16 décembre 2020. Objectif du chancelier Sebastian Kurz : « affirmer la volonté d’en découdre avec l’islam politique ».
La nouvelle loi antiterroriste a été adoptée le 8 juillet dernier. Elle offre aux autorités de plus larges prérogatives dans le domaine de la surveillance et du contrôle des milieux extrémistes. Mais sa mesure la plus importante est l’inscription des Frères musulmans sur la liste des « groupes extrémistes liés à la criminalité à motivation religieuse ». Le nom de la confrérie s’ajoute ainsi à ceux de Daech, d’ Al-Qaida, du Hamas, du Hezbollah, du PKK kurde, des Loups Gris turcs également interdits en France et en Allemagne, et du mouvement fasciste croate des oustachis.
Selon les dispositions de cette nouvelle loi antiterroriste, toute détention ou propagation de slogans ou de documents faisant l’apologie des groupes inscrits sur la liste noire sera puni d’une amende de 4 000 euros et/ou d’une peine d’emprisonnement d’un mois. En cas de récidive, les condamnations pourront aller jusqu’à 10 000 euros d’amende et six mois de prison.
Plus judicieuse que la simple interdiction de groupes ou d’associations, lesquels se reconstituent aussitôt sous de nouveaux intitulés, cette stratégie autrichienne dite de « l’interdiction des symboles » s’avère très efficace. Selon le ministre de l’Intérieur, Karl Nehammer, plus de 27 000 infractions ont été constatées depuis sa mise en place au lendemain des attentats de novembre 2020. Le fait de l’étendre aux Frères musulmans est le coup le plus dur jamais porté à la confrérie en Europe.
SOURCE
Merci pour cet article
Ce pays l’Autriche est capable de sortir des génies comme S. Freud et Mozart, mais aussi un monstre comme Hit…
S’il doit y avoir un réveil de l’Europe je ne vois que l’Autriche la Hongrie et peut être très peu d’autres pays de l’Est. L’Europe de l’Ouest est condamnée, sclérosee, la dhimmitude est là.