France 2 LUNDI 30 Mai 2016 – 20.50 :Laurent Gerra sur les traces de Paul Touvier
Le comédien incarne le journaliste qui, au début des années 70, a traqué et retrouvé la trace du chef de la milice lyonnaise, joué par François Morel.
La Seconde guerre mondiale vient de ressurgir dans votre vie : après le film En mai, fais ce qu’il te plaît de Christian Carion et la publication des carnets de guerre de votre grand-père ( Cette année, les pommes sont rouges , Flammarion), vous incarnez un journaliste traquant Paul Touvier. Est-ce une simple coïncidence ?
« Je suppose qu’il n’y a pas de hasard. Je vis ma passion pour cette période comme un vrai devoir de mémoire, probablement à cause de mon grand-père, le héros de la famille, celui qui a connu la captivité, l’évasion, le maquis de l’Ain. Il fait partie de ces anonymes qui ont fait l’Histoire et contribué à la Libération de la France. Dans la famille, ils ont été Résistants, ils ont connu la peur, leurs récits ne pouvaient que me sensibiliser. À l’adolescence, je me suis mis à acheter des journaux parlant de guerre. »
Qui était Paul Touvier, pour vous, avant le tournage du téléfilm ?
« À vrai dire, j’ai davantage de souvenirs liés au procès de Klaus Barbie, mais le sien comme celui de Touvier, par leur durée, ont fait ressortir toutes les misères et les horreurs de cette période dans notre région. L’image qui me revient de Touvier est une photo de lui, en chemise rouge avec une cordelette de cow-boy autour du cou. Je me souviens avoir fait un sketch avec Jacques Martin pendant son procès. C’était une parodie de Carlos : on chantait “Touvier et tout bronzé” sur l’air de “Tout nu et tout bronzé”. »
Vous incarnez le journaliste de L’Expres s qui l’a traqué. Avez-vous, comme lui, effectué des recherches ?
« On apprend ou se remémore plein de choses grâce au téléfilm : sa cavale, la grâce accordée par le Président Pompidou, etc. J’ignorais, par exemple, que c’était un journaliste qui avait levé le lièvre. Le metteur en scène Olivier Schatzky m’a conseillé de m’inspirer de ce que j’avais découvert en faisant des recherches sur mon grand-père, pour jouer ce journaliste qui n’a rien lâché pour découvrir la vérité sur Touvier. Il était malin, ce Touvier, pervers, il avait des fiches sur tout le monde. Manipuler était une obsession. Il a même entretenu une assez longue relation avec Jacques Brel, sous un faux nom semble-t-il. Il a réussi à se cacher pendant des années, ce fumier ! »
Journaliste, est-ce un métier que vous auriez pu faire ?
« Collégien, j’avais fait un stage au Progrès de Bourg. Je me souviens encore du titre de l’article qui en est sorti : “Observer pour comprendre”. Rien que ça ! À la fac de Lyon, j’ai suivi une filière préparant à ces métiers. Une fois, au festival de Cannes, j’ai demandé à François Chalais pourquoi il avait choisi ce métier. Il m’a répondu par une jolie formule : “Pour ne pas passer à côté du Molière de mon époque”. Moi-même, du fait de ma profession, j’ai côtoyé des artistes et des journalistes passionnants de notre temps. »
Acteur, est-ce une technique très différente de votre métier d’humoriste et d’imitateur ?
« Pour moi, c’est beaucoup plus difficile. J’ai énormément de mal à apprendre les textes. Et il y avait beaucoup de termes techniques : présomption, prescription, je me mélangeais un peu les pinceaux. Le cinéma, c’est beaucoup à apprendre et énormément à attendre entre les prises. Mais j’ai très envie d’en faire davantage. »
Avez-vous été surpris qu’un autre acteur venu de la comédie (François Morel) incarne Touvier ?
« J’ai immédiatement pensé qu’en contre-emploi, François Morel pourrait être terrifiant. Ce qu’il est dans le film. Mon regret aura été de ne pas avoir plus de scènes avec lui. Il faudrait qu’on fasse Paul Touvier au ski pour partager des scènes ensemble ! »
Laurent Gerra
Je vis ma passion pour cette période comme un vrai devoir de mémoire
source :
http://www.leprogres.fr/lyon/2016/05/29/laurent-gerra-sur-les-traces-de-paul-touvier