Daniel Leconte : «Entre nos héros et les leurs, il faut choisir»
FIGAROVOX/TRIBUNE – Le journaliste Daniel Leconte salue l’héroïsme du colonel Arnaud Beltrame, et espère que son sacrifice encouragera les Français à ne plus tolérer la complaisance envers le terrorisme islamiste.
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Daniel Leconte, journaliste, réalisateur et producteur pour la télévision, a notamment remporté le Prix Albert Londres pour son film documentaire «La deuxième vie de Klaus Barbie» (1988).
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Un officier supérieur, en juin 1940, a eu cette intuition magnifique rapportée par Jean-Louis Crémieux-Brilhac dans son livre «Une étrange victoire»: «Nous avons fait la guerre précédente debout, nous faisons celle-là à genoux, nous ferons la prochaine couchés». Nous y sommes. À quelques exceptions sublimes près, nous avons fait la guerre aux totalitarismes nazi et communiste à genoux. Depuis de trop longues années, nous faisons la guerre à l’islamo-fascisme, couchés…
Nous devons, dit-on, riposter à la guerre idéologique déclarée par l’islamisme. En nommant deux fois l’ennemi dans son discours, en remontant le fil de la mort héroïque d’Arnaud Beltrame jusqu’à la Résistance et en le nouant à la mort symboliquement puissante de Mireille Knoll, le Président Macron a prononcé un discours de haute tenue aux Invalides. Après Manuel Valls certes, traîné dans la boue par son camp, ces planqués de l’arrière qui feignent de croire que se battre contre les islamistes c’est débattre avec eux, mais bien avant François Hollande qui se serait grandi à en faire autant quand il était à l’Élysée.
Fallait-il que le sacrifice d’Arnaud Beltrame soit à ce point exemplaire pour changer notre regard ? On a pourtant eu l’occasion de le changer plusieurs fois déjà.
L’histoire rendra justice à Emmanuel Macron pour ce discours-là. Ce n’est pas trop tôt. Espérons maintenant que ce n’est pas trop tard. Car cette guerre idéologique nous a été déclarée il y a plus de trente ans déjà, quand l’islamo-fascisme a débarqué en Algérie sous le visage des Afghans. C’est ainsi qu’on appelait alors ces Algériens qui étaient partis pour le djihad en Afghanistan contre l’armée soviétique d’abord, puis contre les Américains. Ils en étaient revenus la haine au cœur et Dieu à toutes les sauces.
Comme dans beaucoup des guerres idéologiques précédentes, la majorité des intellectuels français a alors fait le lit des «salauds». Dans les années 30, ils avaient été majoritairement pré-collabo. Dans les années 50, ils avaient soutenu Sartre contre Camus ou Aron et nié le goulag pour «ne pas désespérer Billancourt.». Dans les années 90, ils ont convoqué de mauvaises raisons pour trouver des circonstances atténuantes aux tueurs et faire la guerre à nos amis en Algérie. D’abord aux intellectuels algériens qui tombaient sous leurs balles et leurs couteaux. Ensuite au peuple lui-même, à qui ils refusaient de nommer ses bourreaux. Alors comme dans les guerres précédentes, une grande partie des journalistes a suivi ces intellectuels comme les moutons de Panurge, ils ont rajouté du malheur au malheur du monde. Pourquoi? Il faudra revenir un jour sur ces rendez-vous ratés.
Car pour l’heure, comme l’a dit Robert Badinter c’est le temps du deuil, des victimes et des héros.
Jusqu’à ces derniers jours, évoquer la figure du héros dans nos milieux était la façon la plus sûre d’être pris pour un niais et même pour un idiot. Fallait-il que le sacrifice d’Arnaud Beltrame soit à ce point exemplaire pour changer notre regard? On a pourtant eu l’occasion de le changer plusieurs fois déjà.
Quand Salman Rushdie fait sa première apparition publique sur Arte en 1994, alors qu’il vivait reclus sous la menace d’une fatwa. Quand Saïd Sadi la même année toujours sur Arte défie à plusieurs reprises les islamistes alors qu’il venait d’être victime d’un attentat à Alger.
Quand Véronique Tavaud se jette dans la gueule du loup en 1998 pour apporter la preuve que les GIA sont les auteurs des massacres abominables de Raïs et de Bentallah.
Quand en 2007 encore Charlie Hebdo relève le gant, gagne le procès des caricatures et qu’Élisabeth Badinter dit déjà d’eux qu’ils sont nos «héros».
Quand le 7 janvier 2015 enfin, «les dessinateurs de petits bonshommes», Franck Binsolaro le garde du corps de Charb, et le policier Merabet tombent sous les balles.
Entre Riss qui porte la plume dans la plaie des bourreaux et Edwy Plenel qui la remue dans la chair des victimes, il faut choisir.
L’histoire dira cette fois-ci pourquoi Arnaud Beltrame et Mireille Knoll ont rompu la malédiction, et pourquoi d’instinct ils sont devenus nos «héros». L’accumulation des attentats depuis deux ans? La prise de conscience que la haine des tueurs ne vise plus seulement Charlie Hebdo mais chacun d’entre nous? La succession d’actes antisémites répétés et non pris en compte comme tels par la justice? La nature exceptionnelle de l’acte d’Arnaud Beltrame? Ou l’horreur absolue de la mort de Mireille Knoll? Toujours est-il que le télescopage de ces deux drames vient de faire tomber les masques.
À l’heure où l’islamo-fascisme fait son nid chez nous, impossible de laisser salir plus longtemps nos héros par les leurs, par leurs compagnons de route, leurs alliés objectifs ou leurs idiots utiles. Entre Riss qui porte la plume dans la plaie des bourreaux et Edwy Plenel qui la remue dans la chair des victimes, il faut maintenant choisir. On ne peut pas aimer les deux sans trahir l’un des deux. Entre les «dessinateurs de petits bonshommes» qui veulent nous faire rire pour nous faire réfléchir et les planqués qui nous rabâchent qu’ils «l’ont bien cherché», il faut choisir.
Entre Elisabeth Badinter qui regarde les assassins droit dans les yeux et Virginie Despentes qui fait l’apologie obscène des frères Kouachi, il faut choisir.
Entre Boualem Sansal qui aime la vie et les «Indigènes de la République» qui la détestent comme ils respirent, il faut choisir.
Entre Kamel Daoud qui s’interroge sur «le malheur arabe» et Tariq Ramadan qui nous enfume pour convaincre que le malheur c’est nous, il faut choisir.
Mon père, résistant dès juin 40, a percé la ligne Gustav à Monte Cassino le 13 mai 1944 avec les unités d’Afrique du nord de l’armée française et ouvert la route de Rome aux Alliés avant d’être laissé pour mort sur le champ de bataille. J’ai éprouvé beaucoup de fierté pour ces preux-là quand j’ai appris que la promotion d’Arnaud Beltrame s’appelait «Campagne d’Italie». Et aussi, la conviction qu’il faut faire le bon choix entre les vrais héros et des héros anachroniques si on ne veut pas rater les grands rendez-vous avec son temps.
Le Président de la République vient d’ouvrir la route pour nous aider à le faire. Pour combien de temps? La versatilité des opinions travaillées depuis trop longtemps par certains médias influents doit nous rendre prudents. Mais si on veut vaincre «la bête immonde» qui a trouvé d’autres ventres féconds pour renaître, il est urgent de débusquer les faussaires et être fier de nos héros. Très fier, comme le Président l’a été.
C’est maintenant ou jamais.
Source :
http://www.lefigaro.fr/vox/societe/2018/04/06/31003-20180406ARTFIG00269-daniel-leconte-entre-nos-heros-et-les-leurs-il-faut-choisir.php
Très beau texte mais à noter qu’il y a quelques petites erreurs:
Non, l’islamo-fascisme ne fait plus son nid chez nous, il est déjà bel et bien installé et les attentats terroristes de ces dernières années avec près de 300 morts en attestent.
Il ne suffit pas de clamer haut et fort que le responsable de cette tragique situation est « l’islamisme » pour espérer prêcher des convaincus !! Mais pourquoi après tout lui non plus ne pourrait pas se distinguer dans les hommages comme ce fut le cas pour qui vous savez ? En effet, nommer deux fois l’ennemi dans son discours ne sert à rien si les paroles ne sont pas suivies d’actes. Or nous connaissons tous le double langage de nos dirigeants une fois qu’ils accèdent aux plus hautes responsabilités. Celui qui a le verbe haut ne s’est pas gêné pour déclarer: » Il va falloir s’habituer à vivre avec le terrorisme » Ah en voilà un qui n’oublie pas de quel gouvernement il a fait partie. Dédain et mépris envers les Français de la part de ces politiques qui répètent le même discours compassionnel à chaque attentat, à chaque agression, à chaque meurtre commis par des islamistes.
Ils ne font que nous prouver finalement qu’ils ont un train de retard sur les événements et les exemples ne manquent pas: le retour des djihadistes francais d’Irak et de Syrie sur notre territoire; environ 120 mosquées salafistes à fermer en France. Qu’en est t il? Sa loi antiterroriste qui ne terroriserait même pas une mouche et sa toute nouvelle trouvaille: la réforme des prisons, qui, il faut le reconnaitre, est vraiment LA solution au problème carcéral de la France. Mais il est vrai qu’il est plus facile de rencontrer des migrants à Calais et de leur apporter un soutien que de rencontrer nos surveillants de prison qui en ont ras le bol c’est moins risqué etc, etc…! Pourquoi ne pas vouloir s’attaquer aux CAUSES mais encore et toujours uniquement aux CONSÉQUENCES ? Il faut croire que le courage leur fait cruellement défaut 🙁