Complaisance avec l’islamisme, aveuglement sur le nouvel antisémitisme : Jean-Luc Mélenchon est-il aspiré par son électorat ?

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Complaisance avec l’islamisme, proximité avec les Indigènes de la République, aveuglement sur nouvel antisémitisme : ces critiques portées contre Jean-Luc Mélenchon et ses équipes sont-elles la preuve que la France Insoumise est aujourd’hui « aspirée par son électorat » comme l’a affirmé Eric Zemmour dans C à Vous à Patrick Cohen ?

Dans C à Vous, le 10 octobre, Eric Zemmour a accusé Jean-Luc Mélenchon d’être « aspiré » par une partie de son électorat (à 4 minutes sur la vidéo).

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Cette question mérite qu’on lui réponde à l’aide de données empiriques afin de mettre à distance les propos parfois rapides, voire très rapides, des chroniqueurs de la politique. Nous avons réalisé au CEVIPOF une très grande enquête lors de la présidentielle de 2017, un vaste panel électoral sur 20.000 électeurs. Dans la vague de cette enquête, conduite aux lendemains de la présidentielle, nous avons demandé aux électeurs leurs attitudes politiques profondes, au-delà des enjeux d’actualité et de ceux de la présidentielle.
Ce qui apparait dans ces données apparaissait déjà lors des élections antérieures, par exemple la présidentielle de 2012 : les électeurs et sympathisants de la France Insoumise sont caractérisés par un double positionnement, à la fois à gauche à plan économique et tolérants au plan de leurs valeurs sur les questions de société. Sur ce dernier point, on voit que les sympathisants de La France Insoumise sont clairement du côté de la tolérance et de l’ouverture culturelle : si en moyenne 56% des personnes interrogées considèrent que « l’islam est une menace pour l’Occident », c’est le cas de 32% des sympathisants de la France insoumise ; de même, lorsque 41% pensent, en moyenne, que « l’immigration est une source d’enrichissement culturel » c’est le cas de 66% des sympathisants de la France insoumise.
Cela traduit une tendance plus large que pour cette seule famille politique ; plus largement on a vu au cours des deux dernières décennies que les deux axes de la politique française (les questions économiques d’une part et les questions sociétales d’autre part) étaient davantage « corrélés » entre eux : les électeurs de l’ensemble des formations politiques situées à gauche sont plus tolérants au plan des valeurs sociétales que les électeurs de la droite, notamment la partie la plus droitière de la droite. En toile de fond de ces tendances, ces sont des évolutions de la structure sociale qui l’expliquent : la montée des classes moyennes à fort capital culturel, éduquées, souvent urbaines et « ouvertes ». Mais on voit également que cette tolérance culturelle peut potentiellement créer des tensions politiques compte-tenu du fort attachement de la famille politique de la gauche aux valeurs de la république et de la laïcité.
Cette question est complexe, il s’agit d’un sujet à forte charge symbolique car il s’agit d’un pilier de la vie politique française et pas seulement pour les électeurs de la gauche. La sensibilité des électeurs de la gauche à la défense de valeurs républicaines doit sans aucun doute s’articuler à leur attachement à la tolérance culturelle et cela doit sans doute créer des divisions entre « laïcité intransigeante » et « laïcité tolérante ». Mais sur ces questions on manque de données empiriques et le sujet est trop sérieux pour être traité de manière purement abstraite. Je conclurais en incitant tous les chroniqueurs et commentateurs de la politique à faire preuve d’une grande tolérance, empathie et compréhension sur ces questions : notre modèle d’intégration républicaine est un bien précieux mais montre, ou a montré, des signes de dysfonctionnements ou de promesse parfois non tenue. Le ressourcer et en montrer la grande portée politique est toujours un enjeu ; vivre différents et en paix au sein de ce modèle est un bel objectif.

source :

http://www.atlantico.fr/decryptage/complaisance-avec-islamisme-aveuglement-nouvel-antisemitisme-jean-luc-melenchon-est-aspire-electorat-bruno-cautres-3193628.html


Bruno Cautrès est chercheur CNRS et a rejoint le CEVIPOF en janvier 2006. Ses recherches portent sur l’analyse des comportements et des attitudes politiques. Au cours des années récentes, il a participé à différentes recherches françaises ou européennes portant sur la participation politique, le vote et les élections (Panel électoral français de 2002 et Panel électoral français de 2007, Baromètre politique français). Il a développé d’autres directions de recherche mettant en évidence les clivages sociaux et politiques liés à l’Europe et à l’intégration européenne dans les électorats et les opinions publiques. En 2014 il a publié Les européens aiment-ils (toujours) l’Europe ? aux éditions de La Documentation Française.

happywheels

2 Commentaires

  1. b. duchene dit :

    C est vrai que la France a besoin de revoir ses lois et sa minière de

    fonctionner vis a vis de ces gens qui viennent de partout…

  2. Laurence S dit :

    Moi aussi ils veulent me faire taire

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