Cinq mois pour les quenellistes
La vidéo intitulée « Mise au point. Convocation au commissariat : les quenellistes pissent sur la préfecture » était toujours visible sur YouTube hier alors que ses deux acteurs, Lofti Ftaiti, 31 ans, six mentions au casier et Pierre-Marie Payet, 28 ans, cinq mentions, venaient d’être condamnés à cinq mois de prison ferme pour provocation à la discrimination raciale et injures. « L’œuvre » a été tournée le samedi 15 février 2014, un mois après un rassemblement pro-Dieudonné devant la mairie d’Amiens.
Ftaiti, à l’initiative de la manifestation, avait été convoqué par la police locale à la demande du préfet, d’où son ire et celle de son ami Payet, qui se déverse pendant 11 minutes et 22 secondes.
Les injures se focalisent sur le secrétaire général de l’époque, que les deux hommes prennent à tort pour le préfet. Les plus graves prêtent des tendances pédophiles au fonctionnaire, le traitent de « pute à Juifs », « sale pute du CRIF » (conseil représentatif des institutions juives de France), « suceur de sionistes ». Presque pour l’anecdote, les deux hommes menacent la préfecture d’une action à la manière des bonnets rouges qui sévissaient alors en Bretagne. À un moment, Payet, tout sourire, lâche : « Quand je vois Jakubowicz (NDLR : Alain Jakubowicz est avocat du CRIF), je me dis, franchement, Auschwitz, dommage ». « Dommage » reprend Ftaiti, qui se dit backer (choriste) de son slammeur de copain.
Car Pierre-Marie Payet revendique « une performance artistique » et multiplie les références à des jugements ayant blanchi des rappeurs au nom de la liberté d’expression. Le président le titille sur la référence à Auschwitz, il répond calmement : « Ben oui, j’ai dit dommage. Je n’allais pas dire Auschwitz super, Auschwitz youpi ? » Quand même, les Juifs, le CRIF, il y a une petite obsession… » insiste le juge. Payet ne se démonte pas : « On était sur la quenelle, on n’allait pas parler du massacre des Papous ! » A-t-il uriné sur l’édifice public ?« Non, j’avais acheté une grosse seringue à la pharmacie. C’était de la provocation ». Il n’assume que « les insultes aux puissants, car moi, en tant que Français, en tant que Chrétien, ça fait 28 ans qu’on m’insulte ».
La procureur requiert, sans cesse interrompue par les deux hommes : « Comme tous les antisémites, vous dites que vous n’êtes qu’antisionistes ». Quant aux parties civiles, on n’en parlera pas car aucune – pas davantage la préfecture que quelque association – ne s’était constituée hier, ouvrant les vannes à la logorrhée des deux prévenus. Ils ont prévu de faire appel : tout n’est pas perdu.
TONY POULAIN
voir la vidéo et lire l’article du COURRIER PICARD en cliquant sur le lien ci-après
http://www.courrier-picard.fr/region/cinq-mois-pour-les-quenellistes-ia0b0n354388